Sous Rezé, Ratiatum. La cité antique, édifiée au Iᵉʳ siècle de notre ère le long d’un bras de la Loire, n’a pas fini de livrer ses secrets. L’opération d’archéologie préventive menée par l’Inrap à proximité de l’hôtel de ville s’inscrit dans le prolongement des nombreuses fouilles réalisées dans le quartier portuaire de Saint-Lupien. 400 mètres séparent les deux sites. Ce que les archéologues ont découvert est « totalement exceptionnel, assure Marie-Laure Hervé-Monteil, responsable scientifique d’opération. C’est la première fois de ma carrière que j’ai l’occasion de fouiller ce type de vestiges. »
Les deux chantiers de fouilles, conduits de part et d’autre de l’avenue De-Lattre-de-Tassigny, interviennent en amont du projet immobilier Carré Daviais porté par Bati-Nantes. Le premier, réalisé en 2020 sur une emprise de 480 m2, a mis au jour des aménagements de berges, organisés en terrasse, similaires à ceux découverts sur le site de Saint-Lupien. Mais également des éléments situés entre le XIIIe siècle et l’époque moderne, « rares » à Rezé. « Nous avons trouvé des murs de terrasses qui reprennent les principes de l’antiquité, une cave au sol dallé bordée par une rue empierrée avec un caniveau ainsi que les traces d’un escalier. » Ces découvertes ont été présentées au public à l’occasion d’une visite de chantier lors des Journées européennes du patrimoine en septembre 2020.
Des poutres de 2 000 ans
Entre mai et juillet 2021, l’équipe d’archéologues a fouillé une deuxième fenêtre de 1 200 m2 qui s’est révélée « encore plus spectaculaire ». « Des quais antiques de la première zone, il ne restait que les dalles de schiste, rapporte Marie-Laure Hervé-Monteil. Sur cette fenêtre, nous avons découvert du bois de structure portuaire, datant de 2 000 ans, dans un état de conservation remarquable. Les conditions d’anaérobie, rendues possibles par la présence constante de l’eau dans cette zone, ont permis de préserver le bois. »
Les aménagements de berges en terrasse apparaissent sous la forme de murs et de caissons de poutres de bois et de dalles de schiste qui constituaient des plateformes techniques de chargement et de déchargement. Les poutres en chêne, atteignant jusqu’à 10 mètres de long, supportent des poteaux et des contre-fiches. De multiples techniques d’assemblage ont été identifiées – tenon et mortaise, mi-bois, clous – mais aussi des traces laissées par les charpentiers. « Nous avons retrouvé des estampilles faites dans des fabriques de bois, avec notamment les lettres EAD, et des numéros inscrits à la fois sur la poutre et le poteau pour faire les tenons et les mortaises à la même taille. » Les éléments prélevés, notamment le bois, vont maintenant être envoyés dans des laboratoires spécialisés pour la datation. « Ce qui est bien dans les bois antiques, c’est qu’ils peuvent être datés à l’année et même au mois près ! »
Ces découvertes montrent « l’importance de Ratiatum comme cité antique », pour Anthony Descloziers. « Récemment, poursuit l’élu métropolitain en charge du patrimoine et de l’archéologie, nous avons fait des découvertes importantes à Mauves-sur-Loire, il y a une vraie actualité archéologique dans la métropole. Et les habitants se montrent très intéressés, on touche à l’histoire de leur territoire. »
Rencontres au Chronographe pour les Journées du patrimoine
Le public peut découvrir ces deux chantiers de fouilles sur la table d’actualité numérique présente dans l’entrée du centre d’interprétation archéologique. Samedi 18 et dimanche 19 septembre, de 11h à 18h, un archéologue de l’Inrap répondra aux questions des visiteurs. Le Chronographe propose également de nombreuses animations en lien avec l’exposition Le verre dans tous ses éclats visible jusqu’au 7 novembre. Au programme : démonstrations d’artisans verriers, activité en famille, sensibilisation au recyclage du verre, performance poétique…
Infos pratiques sur le site du Chronographe