Faire pousser des légumes bio en plein cœur du parc des Dervallières ou des jeunes plants sur le toit d’un immeuble de Nantes Nord ? L'idée n’est pas si saugrenue qu'il n'y paraît. Ces deux projets, portés par Nantes Métropole et le bailleur Nantes Métropole Habitat, viennent d’être retenus par l’Agence nationale de rénovation urbaine (Anru) dans le cadre de son appel à projets Quartiers fertiles. Comme 73 autres quartiers prioritaires en France lauréats de ce programme, les Dervallières et Nantes Nord verront bientôt des productions agricoles fleurir. L’Anru subventionne les deux projets à hauteur de 50 %, soit 614 500 euros au total.
« L’objectif est de permettre aux habitants d’accéder à une alimentation de qualité, en circuit court, dans ces quartiers en rénovation où la précarité alimentaire est importante, explique Damien Fournel, chargé de mission Transitions à la Mission Politique de la ville de Nantes Métropole. L’agriculture urbaine est un levier de développement pour ces quartiers et un moyen d’accélérer la transition écologique ».
Des légumes bio et des emplois aux Dervallières
Le premier projet s’insérera sur une partie assez peu utilisée du vaste parc des Dervallières. Sur 1 à 1,5 hectare de pleine terre, Nantes Métropole prévoit d’ installer une véritable ferme maraîchère, professionnelle avec des serres et des bâtiments agricoles, où seront cultivés des légumes bio. Le projet, dont l’idée avait germé dans la tête des habitants et acteurs du quartier dans le cadre de l’élaboration du projet global de transformation des Dervallières en 2016, comporte plusieurs volets.
La ferme produira avant tout des aliments destinés aux habitants du quartier. « Nous allons étudier un système de commercialisation solidaire pour que le modèle soit viable pour les producteurs et accessible pour les habitants », détaille Damien Fournel. Sa production permettra aussi de développer d’autres activités sur le quartier (restaurant solidaire, atelier de transformation, etc.). Gérée par une structure d’insertion par l’activité économique, l’exploitation servira, enfin, de chantier d’insertion et de support d’animations pédagogiques autour du jardinage, de l’alimentation et de l’éducation à l’environnement en lien avec associations du quartier. 14 emplois seront créés. « Ce sera une opportunité professionnelle nouvelle pour les habitants qui permettra de se former aux métiers du maraîchage et de l’animation », souligne Pierre Quénéa, vice-président de Nantes Métropole en charge de la politique de la ville.
Nantes Métropole espère lancer concrètement le projet en 2022. Une étude, associant les associations du quartier, le monde agricole et des structures d’insertion, a été réalisée en 2020 avec l’aide de l’association Optim’ism qui gère une micro-ferme similaire dans un quartier de Lorient. « Au-delà de sa vocation productive et sociale, la ferme urbaine de Bois-du-Château a créé de la vie et de la mixité dans ce quartier qui était un peu stigmatisé, témoigne Valentine Abhervé chez Optim’ism. Les habitants discutent avec les maraîchers qui travaillent toute l’année en plein air dans le parc, on échange avec les écoles, la maison de quartier, etc. C’est même devenu un lieu de destination pour les habitants des autres quartiers ! »
Des potagers solidaires et une serre-pépinière à Nantes Nord
À quelques encablures des Dervallières, une deuxième ferme urbaine verra le jour en 2022 au Chêne-des-Anglais, dans le quartier de Nantes Nord. Son nom ? « Nantes Nord fertile ». Innovant, le projet s’articule autour d’une serre-pépinière dont la construction débutera cet été sur le toit d’un immeuble de logements sociaux appartenant à Nantes Métropole Habitat, et de potagers solidaires et participatifs disséminés dans les espaces verts du quartier.
« La serre du programme Symbiose a une double vocation, explique Luc Stephan, directeur Innovation du bailleur social : produire des plants horticoles et maraîchers et valoriser l’énergie produite pour chauffer l’eau de l’immeuble ». Les plants seront vendus pour les jardins familiaux et des jardins solidaires en pleine-terre seront créés pour offrir aux habitants du quartier de nouveaux lieux de convivialité et de consommation de fruits et légumes frais. « Ces jardins participeront au développement de la nature en ville, des circuits courts mais aussi à créer du lien social entre habitants », assure Thomas Quéro, adjoint au maire et président de Nantes Métropole Habitat. Au pied du bâtiment, un premier potager de 300 m², animé par l’association Bio-T-Full, a déjà poussé depuis l’été 2020. Les volontaires peuvent s’y initier au jardinage, se rencontrer, etc. Dans le cadre du projet de transformation globale de Nantes Nord, deux autres parcelles de 1000 m² chacune verront le jour dans les années à venir.
Un foisonnement d’initiatives autour de l’agriculture
Jardins partagés ou collectifs, ateliers cuisine, distribution solidaire, actions anti-gaspi… Les initiatives autour de l’alimentation foisonnent dans les quartiers populaires nantais. Une micro-ferme associative, la Petite ferme urbaine, s’est même installée au pied des immeubles des hauts de Saint-Herblain, au coeur du quartier Grand Bellevue. Animée par l’association Environnements solidaires, elle expérimente au quotidien l’agriculture urbaine avec les habitants. Parmi ses nombreux projets : la création d’une champignonnière pour faire pousser pleurotes et shiitakés dans les caves des immeubles.
Terre historique de maraîchage, Nantes Métropole soutient et accompagne ces projets dans le cadre de son Programme alimentaire territorial. Lancé en 2018, il vise à changer de modèle alimentaire et réduire l’impact sur l’environnement. Le développement de l’agriculture urbaine fait partie des nombreuses actions engagées. D’ici 2025, l’objectif est d’installer 10 fermes urbaines sur le territoire. Certaines sont déjà en germe, dans le futur quartier Doulon-Gohards, ou sur l’île de Nantes avec le projet 5Ponts et la ferme de l’Agronaute.