Alice Milliat naît à Nantes en 1884 dans un milieu plutôt modeste. Devenue préceptrice, elle quitte sa ville natale en 1904 et se marie à Londres. Mais son époux, Joseph, meurt quatre ans plus tard à Paris où le couple Milliat s’est installé. Sportive, Alice Milliat devient l’une des précurseures du sport féminin. Pratiquant l'aviron, la natation, le hockey, et aussi le football, elle s’engage dans l’organisation du sport. Elle est nommée présidente d’un club omnisports, Fémina Sport, en 1915 : c’est le doyen des clubs sportifs féminins dédié notamment au football et à l'athlétisme. Puis elle est la cofondatrice de la Fédération des sociétés féminines sportives de France en 1917, première fédération à se consacrer aux activités physiques féminines. Elle en assume par la suite la présidence. « C’est en partie un effet de la féminisation imposée par la guerre », souligne l’historien Alain Croix.
Après-Guerre, Alice Milliat continue d’œuvrer pour la promotion du sport féminin et étend son action à l’international. En 1920, elle crée la première équipe de France de football féminin. Et lance en 1921 un meeting international à Monte-Carlo « qui s’accompagne de la création d’une Fédération sportive féminine internationale, et se heurte alors au conservatisme et au machisme du mouvement sportif international », relate Alain Croix.
Un combat pour une reconnaissance olympique
L'engagement d'Alice Milliat l'amène à défendre la participation des femmes aux Jeux Olympiques. Une grande partie du monde sportif y était hostile au début du XXème siècle, à l'instar de Pierre de Coubertin lui même. Le fondateur des Jeux Olympiques modernes déclarait ainsi en 1912 : “Une olympiade femelle serait impratique, inintéressante, inesthétique et incorrecte. Le véritable héros olympique est, à mes yeux, l'adulte mâle individuel.” Dès 1919, Alice Milliat demande au Comité international olympique d'inclure les épreuves féminines d'athlétisme aux prochains Jeux qui doivent se tenir à Anvers, en Belgique, en 1920. Elle essuie un refus. En réaction, elle crée des «Jeux mondiaux féminins » à Paris, en 1922, deux ans avant les J.O. (à Paris également), où les femmes représentent seulement 4 % des participants. Devant son opiniâtreté, le Comité international olympique finit par autoriser, enfin, les femmes à participer à des épreuves officielles, et ce dès les Jeux olympiques de 1928 à Amsterdam. À mesure que les J.O. s'ouvrent aux femmes, la Fédération sportive féminine internationale est dissoute en 1938.
Mais Alice Milliat va peu à peu voir son influence décliner. Celle qui en 1935 lui succède dans la conduite du sport féminin en France, Marie-Thérèse Eyquem, n’a pas les mêmes convictions qu’elle (voir ci-contre). Décédée en 1957 à Paris, elle est inhumée au cimetière Saint-Jacques à Nantes où pour respecter ses dernières volontés, aucun nom ne figure sur sa sépulture. Alice Milliat, tombe dans l'oubli. Même si depuis 2005 une Cité U porte son nom sur le campus à Nantes. Mais il faudra attendre la création d'une fondation en 2016 pour que sa mémoire soit commémorée à la hauteur de son combat.
Sources : Le Dictionnaire de Nantes (Presses universitaires de Rennes) / Alice Milliat, les 20 ans qui ont fondé le sport féminin français, Stéphane Gachet (Geste éditions, Compagnie du livre).
En 2016, le nom d’Alice Milliat ressurgit avec la création d'une fondation pour la "médiatisation et la promotion du sport au féminin". Il s'agit de la première fondation européenne en faveur du sport féminin. Puis, en novembre 2020, le Conseil départemental de Loire-Atlantique décide de rebaptiser la Maison des sports implantée à Bellevue, et lui attribue le nom d’Alice Milliat. Le bâtiment longeant la rue Romain-Rolland accueille, depuis plusieurs années, les sièges et bureaux d’une cinquantaine de comités sportifs dont les deux comités olympiques départemental et régional : le CDOS et le CROS. “Nommer la maison des Sports de Loire-Atlantique « Alice Milliat » représente un geste fort pour l’égalité femmes-hommes”, déclare alors Philippe Grosvalet, président du Conseil départemental.
Sources : fondationalicemilliat.com & loire-atlantique.fr
Nouvelle consécration en 2024, au terme d'une concertation, puis d'un vote des habitants, le nom d'Alice Milliat a été retenu pour l'école Nantes Sud, qui ouvrira ses portes à la rentrée scolaire.