Elle a été deux fois détruite et reconstruite
Construction métallique de 110 tonnes, au curieux portique dissymétrique, la grue noire a été mise en service en 1943 et pouvait soulever jusqu’à 13 tonnes. Les chantiers navals Dubigeon, à qui l’on doit notamment le Belem, étaient alors spécialisés dans la construction des chalutiers, des petits cargos et des sous-marins. Installée entre des ateliers de chaudronnerie (disparus depuis) et le quai d'armement, dotée de deux moteurs électriques, la grue assurait les manutentions pour l'équipement intérieur et extérieur des navires une fois la mise à l’eau réalisée. En août 1944, elle est détruite par l’occupant allemand avant son départ de Nantes. Remise en service en 1947, elle subit une tempête l’année suivante. Elle redevient opérationnelle en 1950 et sera utilisée jusqu'en 1967, quand la construction navale quitte Chantenay pour la Prairie-au-Duc (actuelle île de Nantes).
Elle appartient à la Ville de Nantes
La question de la conservation des grues du port s’est posée avec la fermeture des chantiers navals nantais, en 1987. Dès 1989, la grue Titan jaune, devenue propriété de la Ville de Nantes, est restaurée. Sa voisine grise, à l’extrémité ouest de l’île de Nantes, est acquise en 2005 et remise en état l’année suivante. La Ville acquiert la grue noire des anciens chantiers Dubigeon en 2012. Symboles du passé industriel et ouvrier de Nantes, parmi les derniers témoins de l'activité portuaire et de la construction navale, les trois grues sont aussi devenus de véritables signaux urbains.
Elle va être restaurée pendant un an
La grue noire et son portique sont aujourd’hui très dégradés. En décembre 2020, sa restauration est actée par un vote en conseil municipal. Les travaux, prévus pour durer de la fin juin 2022 au printemps 2023, vont comprendre des opérations de décapage, de réparation et de remise en peinture de l’ensemble de la structure. La grue sera démontée et restaurée dans un entrepôt à proximité du site. La consolidation et la mise aux normes de l’estacade et des quais seront également assurées. Ils seront à terme accessibles au public. La maîtrise d’œuvre est assurée par le groupement SCE et ASTEKE situés à Nantes et à Brissac, et la restauration attribuée à la société LASSARAT / MANANG.
Elle bénéficie du mécénat d'entreprises
Le conseil municipal a voté une enveloppe prévisionnelle de 2,9 millions d’euros TTC, dont 2,3 affectés aux travaux. La Ville de Nantes peut aussi compter sur des subventions de l'État au titre des Monuments historiques (210 000 €) ; le Département et la Région sont également sollicités. Outre ce financement public, la grue noire fait partie des projets du catalogue du Fonds métropolitain pour la culture, via le mécénat d’entreprises. Un objectif de 800 000 € a été fixé. Sept mécènes (Bâti-Nantes, Fondation Spie Batignolles, ICADE, Kaufman & Broad , Chantiers de l’Atlantique, Les Nouveaux Constructeurs, Promogim) ont déjà répondu à hauteur de 155 000€.
Elle est inscrite au titre des Monuments historiques
« Nantes est la ville en France dotée du plus beau patrimoine de grues classées : 3 des 5 grues classées sont à Nantes », rappelle Olivier Château, adjoint au patrimoine. Mais elles ne bénéficient pas du même niveau de protection : alors que la grue Titan grise est « classée » au titre des Monuments historiques sur le territoire national, la grue Titan jaune et la grue noire de la cale Dubigeon sont seulement « inscrites ». La situation pourrait évoluer. Le service de la conservation régionale des monuments historiques (DRAC des Pays de la Loire), en lien avec la Ville de Nantes, a proposé que ces deux édifices obtiennent d’être classés. La commission régionale du patrimoine et de l'architecture (CRPA) a émis un avis favorable à cette demande.
Elle est au cœur d’un projet urbain
« Ce projet est emblématique de la valorisation du patrimoine ligérien », souligne Anthony Descloziers, membre du bureau métropolitain en charge de la Loire, du patrimoine et de l’archéologie. L'élu rappelle par ailleurs combien la grue noire, située au cœur de la cale Dubigeon, est « un totem pour le projet urbain du Bas-Chantenay ». Le site des anciens chantiers navals est progressivement réhabilité : rénovation de la salle à tracer (2017), transformation des anciens entrepôts en brasserie et aménagement d’un ponton pour le Navibus N2 (2019). A terme, ces Docks de Chantenay vont constituer une véritable place publique avec un accès à la Loire et la création d’une station fluviale afin de favoriser le transport multimodal avec la gare de Chantenay.