Se réapproprier l’Histoire avec Les Anneaux de la Mémoire
Publié le 14 mai. 2025
Dernière mise à jour 16 mai. 2025
Depuis plus de 30 ans, l’association Les Anneaux de la Mémoire œuvre sur le territoire nantais, mais aussi sur les scènes nationales et internationales, pour transmettre l’histoire et les héritages de l’esclavage colonial, notamment par des projets œuvrant pour la déconstruction des représentations associés aux personnes racisées. Des stéréotypes qui restent profondément ancrés dans une société au passé colonial et esclavagiste. Un travail fondamental qui s’inscrit notamment dans la programmation culturelle nantaise autour du 10 mai.
« L’actualité est malheureusement chargée », souffle Barbara Chiron, coordinatrice de projets au sein de l’association Les Anneaux de la Mémoire. Avec la banalisation croissante du racisme à différents niveaux, en France mais aussi à l’étranger, le travail de sensibilisation, d’information et de formation de l’association est plus que jamais d’actualité. De projets, l’association n’en manque pas, surtout au mois de mai. Entre la journée nationale des mémoires de la traite, de l’esclavage et de leurs abolitions le 10, et la journée nationale en hommage aux victimes de l’esclavage colonial le 23, les initiatives locales sont foisonnantes.
Exposition, résidences artistiques et projet européen
En plus des évènements proposés au sein de la programmation culturelle du 10 mai, l’association s’est investie dans le cadre de la saison culturelle franco-brésilienne à travers une initiative artistique mêlant art, histoire et création textile. C’est l’artiste afro-européen Gombo, ancien étudiant nantais qui a été choisi pour ce projet. Deux résidences artistiques sont prévues au Brésil pour explorer les héritages africains de la ville brésilienne et les stigmates de l’esclavage qui marquent encore les communautés locales. « L’association a également été partie prenante d’un partenariat européen, explique Barbara Chiron. Au sein du projet Legacy in Progress (LEAP) , nous avons pu proposer plusieurs ateliers en ligne thématiques abordant une variété de sujets comme l’afrodescendance et la diversité européenne, le luso-tropicalisme, la traite atlantique et l’esclavage colonial, mais aussi l’afroféminisme. »
Enfin, c’est une exposition faisant suite au projet MANIFEST exposé à l’Atelier à Nantes en 2024 qui poursuit son chemin jusqu’à Basse-Terre et Marie-Galante en Guadeloupe, pour explorer l’histoire certes, mais surtout les conséquences tangibles du passé colonial de la France.
Un devoir de mémoire, toujours plus important
Comme illustration de ces répercussions, l’œuvre numérique Sonjé créée par David Gumbs peut être citée. L’artiste aborde l’impact du chlordécone, cet insecticide interdit en métropole dans les années 1970 mais utilisé massivement vingt ans de plus aux Antilles pour sauver une industrie de la banane déclinante. « C’est une illustration très concrète de la manière dont on considère les populations locales. A cause de cela, la Martinique et la Guadeloupe ont aujourd’hui le plus haut taux de cancer au monde. Le territoire, l’eau, sont profondément contaminés et le chlordécone empoisonne la population, sans que l’État ne reconnaisse complètement sa responsabilité », déplore Barbara Chiron.
Nouvelles représentations
Par le biais de projets culturels riches et variés, Les Anneaux de la Mémoire interrogent le discours dominant sur l’héritage esclavagiste. « Les artistes comblent les vides quant aux représentations des personnes racisées et afro-descendantes. Ils et elles leur donnent des voix, des visages, révèlent des trajectoires personnelles originales et inspirantes », explique la coordinatrice de l’association.
Par ce travail de transmission, de sensibilisation, et de mise en lumière, l’association permet la réappropriation d’une histoire racontée très majoritairement par les européens. Elle permet aussi de visibiliser les résistances à la domination, la transmission d’une identité, la création d’autres façons de penser, d’autres imaginaires collectifs. Et pour cela l’association utilise le travail d’artistes, organise des conférences, des visites-guidées à Nantes, mais aussi et bientôt des podcasts ou une exposition pédagogique itinérante. Toujours plus de projets, pour parler sans tabou de la Traite atlantique et de l’esclavage colonial de la France.
À retrouver dans le cadre de la programmation culturelle du 10 mai 2025
La conférence en ligne : Ces « hommes dangereux » de 1848 : l’amnistie à l’épreuve de l’abolition de l’esclavage
La rencontre artistique : Déconstruire, dit-iel – L’art contemporain et le défi post-colonial