Ratiatum n’a pas fini de révéler ses secrets. L’ancêtre gallo-romain de Rezé, qui s’étendait il y a 2 000 ans le long d’un bras de Loire, est l’objet de toutes les attentions des archéologues qui ouvrent, au fil des ans, des « fenêtres » dans cette ville portuaire de 1,5 km de long et de 250 à 500 mètres de large.
Après la découverte de vestiges de quais antiques lors de fouilles préalables à la réalisation du Carré Daviais, l’Inrap investit depuis fin septembre une parcelle de 600 m² face à l’hôtel de ville. Un chantier conduit en amont de l’aménagement de la place Daviais. « Ces projets urbains sont une occasion formidable de compléter le plan de la ville. Nous sommes ici au pied de l’église, au cœur du bourg. C’est une chance inouïe », se réjouit Marie-Laure Hervé-Monteil, responsable du chantier, jeudi 28 novembre.
Une chaussée romaine mise au jour
En deux mois de fouilles, les huit archéologues ont mis au jour un morceau de la rue qui traversait l’agglomération antique il y a 2 000 ans : « C’est un ouvrage avec une superposition de matériaux pour pouvoir continuer à rouler en cas de nids de poule ou d’ornières », précise Marie-Laure Hervé-Monteil. Des tuiles, tout juste découvertes et en cours de nettoyage, indiquent la possible présence d’un portique dont la toiture se serait effondrée. « C’est une hypothèse valable car sur le site archéologique de Saint-Lupien, on a trouvé des portiques. »
150 tombes médiévales
Au-dessus de ces vestiges antiques, un cimetière médiéval s’étend sur la quasi-totalité de la parcelle. Pas une surprise pour l’Inrap, le site étant à proximité d’une église. « Pour le moment, on le date sur une longue période allant du VIe au XVIe siècle. Ce qui est certain, c’est qu’il est antérieur à 1830 car sur le cadastre napoléonien, l’espace comprend des maisons. » 150 sépultures ont déjà été identifiées et plus de 80 fouillées. Les défunts, inhumés la tête à l’ouest dans le même sens que l’église, « se superposent et se recoupent car il fallait pouvoir enterrer un maximum de monde dans un espace restreint », explique Marie Perrin, archéologue-anthropologue. « Dans les rites chrétiens, il est très important de conserver l’intégrité du corps mais dans les faits, on voit que ce n’est pas toujours le cas. L’essentiel était d’être enterré dans le cimetière, la terre consacrée, plutôt que de préserver le corps. »
Les archéologues ont découvert des linceuls, des sarcophages et des « aménagements pour caler les crânes », témoignant de la diversité des pratiques funéraires au fil du temps. L’absence de mobilier, excepté un pot, et de cercueils, démocratisés à partir du XVIIe siècle, confortent la présence du cimetière « avant la période moderne ». La datation au carbone 14 des ossements, réalisée dans les prochains mois, va permettre de préciser ces premières estimations.
« L’archéologie permet aux communes de connaître toutes les richesses de leur territoire et de favoriser son identité. Ici à Rezé, sur le site de Ratiatum, on sait l’impact que ces découvertes ont dans la vie des habitants pour leur permettre de s’approprier leur histoire et leur territoire », rappelle Anthony Descloziers, vice-président de Nantes Métropole en charge du patrimoine et de l’archéologie. Le chantier va se poursuivre jusqu’en mars 2025, promettant encore de nouvelles découvertes.
Des visites à destination des écoles
Le Chronographe, centre d’interprétation archéologique métropolitain présent à quelques centaines de mètres du chantier, propose des ateliers et des visites à destination des écoles rezéennes, en partenariat avec les archéologues de l’Inrap. Cette proposition s’inscrit dans le cadre d’une saison hors les murs qui se déploie jusqu’à septembre 2025 dans différents lieux de la métropole autour de visites de chantier, ateliers pédagogiques et expositions.
+ d'infos sur le site du Chronographe