[Notre Histoire] Nantes, terre de parfums

Publié le 30 juin. 2025

Dernière mise à jour 01 juill. 2025

La Cité des ducs a joué un rôle important dans le développement de l’industrie des parfums et savons. Retour sur une histoire nantaise méconnue.

  • L'usine des savonneries Biette à la fin du 19e siècle
    L'usine des savonneries Biette à la fin du 19e siècle. Son slogan : "Les savons Biette font les délices de la toilette". © Collection Arnaud Biette

Dès le 17e siècle, l’industrie du parfum et du savon tient une place significative dans le paysage économique nantais, et même français. Idéalement située au bord de la Loire, elle bénéficie de l’activité portuaire pour acheminer les produits dont elle a besoin et de l’acclimatation de variétés florales comme le muguet et le magnolia. Deux familles vont particulièrement marquer cette histoire nantaise : les Sarradin et les Biette.

Sarradin, 175 ans d’histoire

En 1781, Paul Sarradin quitte Paris et installe à Nantes, à l’angle des rues de la Fosse et du Puits-d’Argent, son premier atelier-laboratoire, dans lequel il peut fabriquer ses parfums. Une quinzaine d’années plus tard, la boutique, devenue trop petite, est transférée au n°7 rue de la Fosse, (actuelle librairie Coiffard). Émile Sarradin succède à son père Paul en 1828. Il va durablement transformer l’entreprise familiale, jusqu’à sa mort en 1896. Son fils aîné Paul-Émile consolide leur succès, avec la création d’une usine de fabrication de savons et de parfums rue Laënnec. Leurs produits rivalisent avec ceux des plus grands parfumeurs français. Mais « les innovations industrielles s’accélérant au 20e siècle, il devient difficile pour la famille Sarradin de concurrencer l’international », explique Nantes Patrimonia. Le déclin est alors inexorable.

  • Boutique Sarradin
    La boutique du parfumeur Sarradin implantée au 7, rue de la Fosse © Archives de Nantes

Biette, savonnerie et parfumerie

Avec ses parfums et ses coffrets précieux, Biette est la première savonnerie nantaise à se lancer dans les savons de toilette et à positionner la ville sur la carte des produits de luxe français. « Si les premières savonneries nantaises ont comme modèle Marseille, Alexis Biette (1850-1915) va s’inspirer du savoir-faire anglais dans le savon de toilette dont ils sont les grands spécialistes. Biette était le plus grand exportateur de savons de toilette et parfums en Afrique du Nord, avec la marque Levantine », rappelle Arnaud Biette, descendant et spécialiste de l’histoire industrielle nantaise.

Maxime Biette remplace son frère aîné décédé en 1920, pour assurer l’avenir de l’entreprise familiale. « Il veut rendre accessible les savons et les démocratiser et pousser l’activité des parfums. Et ça marche ! En 1934, Maxime Biette rachète Bertin, un Nantais, puis en 1939 Lemoine, un parfumeur parisien renommé, pour monter en gamme », souligne Arnaud Biette. Néanmoins, la Seconde Guerre mondiale vient contrarier les plans et les projets de développement. Après avoir repris deux savonneries nantaises et trois marseillaises, la société anglaise Lever propose de venir produire dans l’usine familiale afin de remplacer son usine du nord de la France bombardée. Une bataille juridique aboutit à une fusion totale avec Lever (future Unilever) en 1948. C’est la fin d’une saga.

  • publicité Savons Biettes
    La publicité est un élément important de l'image développée par l'entreprise Biette. © Collection Arnaud Biette

Quand Sarradin parfumait Marie-Antoinette

Sarradin, maître de fabrication, participe aux compositions des parfums de l’épouse de Louis XVI, tout en apprenant sous l’aile de Jean-Louis Fargeon, maître-parfumeur de la cour de Versailles et le plus célèbre en France au 18e siècle. Paul Sarradin deviendra dépositaire des parfums de Fargeon à partir de son installation à Nantes.   

  • Mouleuses de savon
    Les mouleuses de savon dans l'un des ateliers de l'usine Biette quartier République. Il sera détruit par un violent incendie en 1916. © Collection Arnaud Biette

Biette, parfumeur de luxe

L’utilisation de parfum pour les savons favorise la création en 1906 de la marque Parfumerie Moderne, qui rentre en compétition avec les maisons parisiennes. Le tournant vers le haut de gamme est pris dans les années 1920 avec le recours à des emballages de luxe – Baccarat et Despinoix pour les flacons, Tolmer pour les boites – et aux meilleures matières premières provenant de Grasse. Pour sa publicité, Biette fait appel à l’affichiste Jean d’Ylen et à des vedettes de l’époque dont Maurice Chevalier.

3 dates clés de l'histoire nantaise des parfums

1899

Paul-Émile Sarradin est élu maire de Nantes jusqu’en 1908, mandat durant lequel il fonde l’AMF (Association des maires de France).

1955

Fermeture définitive de l’entreprise Sarradin.

1961

Regroupement de l’activité du groupe Biette sur un site industriel unique dans le Nord de la France.