Comment est née la série Dancefloor(s) ?
« C’est d’abord du vécu ! Je baignais déjà dans cette culture quand je suis revenu à Nantes en 2017, après avoir travaillé à Paris. 2017, ce sont aussi les débuts du Macadam, le club qui a redéfini le paysage des musiques électroniques à Nantes – voire en France – et qui est devenu un point névralgique pour tous les passionnés de la région. J’ai pu y rencontrer les DJ résidents, les collectifs qui venaient produire leurs propres soirées, puis je suis allé à la rencontre d’autres lieux, d’autres soirées, plus petites ou plus grandes : Scopitone, Paco Tyson… Avec ma casquette de réalisateur pour Sourdoreille, j’ai filmé de mai 2023 jusqu’à l’hiver, soit une trentaine de jours de tournage. J’étais parti pour réaliser un 52 minutes qui retracerait l’histoire des musiques électroniques à Nantes, mais j’aurais eu trop de coupes au montage, alors j’ai opté pour le format série, avec quand même une chronologie. »
Dancefloor(s) prend pour point de départ le teknival du Carnet en 1997. Et ensuite ?
« En fait, après les années 1990 et l’époque des free-parties, les choses n’ont recommencé à bouger qu’au début des années 2010 avec Concrete. Ce collectif, installé dans une péniche à Paris, invitait des DJ internationaux et a fait naître plein de talents. Cette 2e vague est arrivée un peu après en province. À Nantes, 2014 a vu la création de nouveaux collectifs, l'organisation de beaucoup de soirées, et le public a suivi. Les Goûtez électronique, un grand rendez-vous le dimanche après-midi, gratuit et ouvert aux familles, a beaucoup démocratisé cette musique côté jour. Dans le Bas-Chantenay, le Club CO2 et les fêtes d’Abstrack ont aussi lancé le mouvement côté nuit. »
En quoi la scène électro nantaise est-elle singulière ?
« Ce n’est pas sur le son – je ne sais pas s’il existe un "son nantais" ! – mais la solidarité entre les artistes, les collectifs. Une anecdote illustre bien cette volonté de ne pas se marcher dessus. Quand le nombre de soirées a explosé, tous les acteurs se sont assis autour d’une table et se sont dit : on va faire un agenda ! Aujourd’hui, on voit beaucoup d’échanges, des DJs qui s’invitent les uns les autres, qui croisent leurs styles, et donc on a ici beaucoup de sous-genres, de diversité, d’éclectisme. »
La série montre aussi les obstacles, entre annulations, interdictions, préjugés… La fête reste un sujet politique ?
« Je dirais qu’il y a différents espaces. Par exemple, Nicolas Viande – qui a créé le collectif Karbon 14, un des premiers soundsystems locaux – travaille aujourd’hui avec les institutions, à Station Nuage, à la Cantine du Voyage… Il reste fidèle à son créneau et c’est un vrai activiste de la scène, mais pour lui, ce n’est plus une lutte. Pour d’autres, c’est plus compliqué. Infracore, par exemple, sans doute parce qu’ils ne rentrent pas dans un circuit économique. Les Sweatlodge, eux, ont des salariés, travaillent avec des intermittents, mais leurs fêtes éphémères ont des autorisations très fragiles. Il y a moins d’espace, plus de pression du voisinage... Comme ils le disent dans la série, faire du bruit, c’est politique ! »
Newsletter : l'info vient à vous !
Recevez régulièrement l'essentiel de l'information nantaise.
📢 Abonnez-vous à la nouvelle newsletter "Que faire à Nantes ?"