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Les espaces de nature en ville jouent-ils sur notre santé ?

Actualités- Mis à jour le 30 mai 2024

Nantes Passion, le magazine de la Ville de Nantes, consacre son dossier de mai au développement des espaces verts. Ghozlane Fleury-Bahi, professeure en psychologie sociale et environnementale à Nantes Université, nous éclaire sur leurs effets sur la santé des citadins. Et leur rôle face aux défis climatiques.

Un gazon rustique a été semé cet hiver sous les arbres du cours Saint-Pierre pour apporter de la fraîcheur et renforcer l’ambiance de sous-bois. D’ici l’été 2025, 8 000 m2 supplémentaires seront végétalisés sur les cours Saint-Pierre et Saint-André. © Romain Boulanger
Un gazon rustique a été semé cet hiver sous les arbres du cours Saint-Pierre pour apporter de la fraîcheur et renforcer l’ambiance de sous-bois. D’ici l’été 2025, 8 000 m2 supplémentaires seront végétalisés sur les cours Saint-Pierre et Saint-André. © Romain Boulanger

Pour vivre en bonne santé, mettons-nous au vert. Cette formule est-elle fondée ?

« L’Organisation mondiale de la santé (OMS) définit la santé comme un état de complet de bien-être physique, mental et social. On ne parle pas uniquement d’absence de maladies. Cela intègre la santé physique (somatique), mais aussi le bien-être mental et la qualité des interactions sociales. Il y a une littérature scientifique très riche sur le rôle joué par les espaces de nature sur la santé des citadins. La synthèse de ces travaux - développés dans différentes disciplines (épidémiologie, santé publique, sciences humaines et sociales, psychologie, géographie, etc.) - montre de nombreux effets positifs d’un contact direct aux espaces verts sur la santé mentale et le bien-être social. »

L’effet du contact aux espaces verts est-il immédiat ?

« À court terme, ce rapport à la nature joue sur les affects, ce qui entraîne plus d’émotions positives, une augmentation de la vitalité, une réduction de la colère, de la tristesse, du stress et de l’anxiété. À plus long terme, on observe aussi une meilleure qualité de vie perçue, un niveau de bien-être plus élevé, un sommeil de meilleure qualité, une réduction du sentiment de solitude. »

Qu’est ce qui explique ces effets bénéfiques ?

« Une des principales explications est qu’une grande quantité d’espaces verts au sein d’un quartier entraîne une pratique d’activité physique plus importante. Ces espaces permettent de faire du sport, se promener. Cette activité est bénéfique aussi bien pour le corps que pour l’esprit. La présence de nature en ville améliore aussi concrètement notre environnement physique : qualité de l’air, nuisances sonores, îlots de chaleur… Dans les parcs et jardins, il y a moins de bruit et plus de fraîcheur, les sons et les odeurs sont apaisants (chant des oiseaux, bruit du vent dans les arbres...), on peut s’y relâcher. Cet environnement joue aussi sur les relations et la cohésion sociales : on peut s’y rencontrer, faire des activités en groupe, comme jardiner ensemble, ce qui favorise le bien-être, atténue le sentiment d’isolement, le stress et la fatigue physique. Cela renvoie à deux théories utilisées en psychologie : la théorie de la réduction du stress et celle de la restauration de l’attention. Selon cette dernière, l’interaction avec les espaces de nature déclenche des changements positifs dans le fonctionnement cognitif. L’immersion dans cet environnement naturel permet de récupérer d’une fatigue mentale et de faciliter le rétablissement des capacités d’attention et de concentration. Ils apportent une sensation de relâchement et permettent de se détacher des pensées et préoccupations quotidiennes qui peuvent altérer notre énergie mentale. »

Le bien-être des habitants est-il lié à la quantité d’espaces verts accessibles près de chez soi ?

« Il est important d’avoir à proximité de son logement des espaces verts et bleus. Les espaces aquatiques ont des effets parfois encore plus marqués. Mais une étude que nous avons réalisée dans le cadre du programme européen Nature4Cities montre que ce n’est pas uniquement la quantité objective de nature qui joue sur le bien-être. D’autres variables entrent en ligne de compte, comme l’accès à des jardins communautaires ou partagés, ou encore notre niveau de connexion à la nature d’un point de vue culturel, identitaire… Il est dont très important de développer ces espaces verts en associant les habitants pour qu’ils se les approprient réellement. »

À Nantes, la nature gagne du terrain au-delà des parcs et jardins traditionnels, dans les rues, les parkings, sur les places… Cela produit-il les mêmes effets sur la santé ?

« Toutes les études sur le sujet considèrent la surface végétalisée autour du logement au sens large : les parcs, squares et jardins publics, mais aussi les jardins privés auxquels les habitants n'ont pas forcément accès, les arbres dans les rues… Ces travaux montrent que même un simple accès visuel, une vue sur un espace vert, peut générer des effets positifs. La végétalisation des villes va donc dans le bon sens pour améliorer le bien-être et la qualité de vie des populations. Mais aussi pour réinjecter de la biodiversité dans l’environnement urbain et nous adapter au changement climatique : réduire les îlots de chaleur, éviter les inondations, dépolluer l’air que l’on respire... La santé humaine, animale et l’état écologique global de l’environnement sont étroitement liées : la santé des uns dépend de celle des autres. Un environnement dégradé, ou insuffisamment végétalisé, impacte autant la santé des hommes que celle des animaux. Et vice versa. Pour avancer efficacement et répondre aux défis majeurs auxquels nous devons faire face, il faut agir sur ces trois dimensions. C’est l’approche « One Health », c’est-à-dire une seule santé pour tous les êtres vivants, défendue par l’OMS, l’organisation mondiale de la santé animale et l’organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture. »

Plus de nature en ville ? Feuilletez le dossier du Nantes Passion de mai 2024

 

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