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Histoire, parti pris des architectes, conception bioclimatique, activités économiques et conviviales… Pour mieux comprendre cette reconversion XXL, consultez notre dossier spécial Tour Bretagne.
En 2019, des travaux sur les volets de désenfumage de la tour n’ont pas pu être réalisés en raison de la présence d’amiante qui nécessitait d’opérer dans un bâtiment totalement vide. En octobre de la même année, la sous-commission départementale de sécurité a émis un avis défavorable à la poursuite de l’exploitation de la tour, entraînant sa mise en sommeil progressive. L’édifice a fermé ses portes et son célèbre Nid en juin 2020, après le déménagement des derniers occupants. Pour l’imaginer revivre, la Tour Bretagne devait être entièrement sécurisée et donc réhabilitée avec un projet d’envergure à la hauteur de ce symbole nantais.
La forme d’origine de la tour est effectivement conservée pour respecter l’histoire de ce bâtiment emblématique, et répondre aux impératifs de la transition écologique : réhabiliter l’existant, c’est faire l’économie de 14 000 m³ de béton et 1 600 tonnes d’acier (plus de détails dans les réponses suivantes). Mais des nouveautés, il y en a et elles sont nombreuses ! La tour bénéficiera d’un design repensé pour une allure plus élégante et contemporaine. Et de nouveaux usages. À l’intérieur, on trouvera logements, hôtel, restaurant, commerces, espaces dédiés au co-working et à l’économie sociale et solidaire, ou encore de nouveaux stationnements vélos (250, contre aucun aujourd’hui) et plusieurs aménagements en faveur de la biodiversité…
Vous êtes très nombreux à exprimer votre attachement à ce célèbre rooftop. « Rendre la tour aux habitants en leur permettant de retrouver l’accès à son sommet » est l’une des trois priorités portées Johanna Rolland, maire de Nantes et présidente de la Métropole, copropriétaire du bâtiment à hauteur de 19 %. Grâce à sa réhabilitation, on pourra demain à nouveau admirer le ciel de Nantes avec une vue panoramique à 360 degrés, mais aussi boire un verre, écouter un concert, voir une expo dans un nouveau lieu convivial et culturel comme l’était Le Nid. Ce belvédère panoramique, niché au 34e étage, sera accessible gratuitement, avec un accès indépendant. Autres exigences de la collectivité : réserver des espaces à des activités sociales et solidaires, et allier l’innovation architecturale aux enjeux écologiques avec une réhabilitation sobre sur le plan de l’empreinte carbone.
La transformation ne sera ni spectaculaire, ni extravagante. Les architectes de PCA-Stream et Magnum ne sont « pas partisans de la table rase, ni des gestes architecturaux gratuits ». Ils défendent une intervention « frugale et responsable ». Leur démarche met l’accent sur la sobriété. En s’appuyant sur la structure existante, ils veulent renforcer l’élégance de cette tour de 144 m de haut. Pour cela, il fallait une couleur « sobre et intemporelle », à l’épreuve du temps. L’enjeu est de ne pas se lasser d’ici 4/5 ans à cause d’un choix de couleur trop prononcé. L’aluminium recyclé, choisi pour couvrir la tour, jouera avec les lumières de la ville pour mieux l’intégrer dans le paysage nantais.
L’apparence de la Tour Bretagne, édifice mal-aimé, a toujours fait débat depuis son inauguration en 1976. Rien d’étonnant à ce que cela continue avec sa réhabilitation ! Pour lui donner une seconde vie, les architectes ont fait le choix de conserver sa forme d’origine, tout en accentuant sa finesse et son côté élancé, « avec le renforcement des lignes verticales en façade ». Exit également le marron typique des années 1970, la façade va gagner en clarté grâce à l’utilisation d’aluminium recyclé. « Ce matériau léger présente la qualité de changer selon la luminosité ambiante, passant du blanc à l’argenté voir à l’orange au coucher du soleil. La tour pourra ainsi arborer des reflets changeants selon les heures et les saisons », explique Philippe Chiambaretta, architecte chez PCA-Stream.
Les architectes se sont, eux aussi, posé cette question. « Ce socle original est très sculptural, reconnaît Philippe Chiambaretta, mais il est inerte et très lié la voiture. » Le symptôme, selon lui, « d’une époque où la France a voulu copier les tours américaines, avec une traduction solitaire qui nie les espaces publics. » A New-York, le socle des tours est à échelle humaine, avec de la vie, des commerces, des bureaux… « Celui de la Tour Bretagne est un parking pas très convivial. » La construction d’un bâtiment indépendant à la place de ce parking à la rampe d’accès monumentale permettra d’accueillir un hôtel et d’alléger les contraintes techniques sur la tour. Sur son toit, viendra s’implanter un nouveau restaurant, offrant une terrasse avec des vues au-dessus des toits de Nantes. Ce réaménagement sera aussi l’occasion d’améliorer et de végétaliser les espaces publics aux abords de la tour, entre la place Bretagne et la place du Cirque, avec la création d’un escalier rue de l’Arche-Sèche.
Le simple fait de réhabiliter l’existant et non pas de démolir pour ensuite reconstruire est un acte écologique fort. « La reconversion des friches tertiaires est un enjeu primordial dans toutes les villes pour créer des logements sans artificialiser les sols », assure Michel Giboire, président du groupe immobilier. C’est la meilleure façon d’économiser du carbone. » Il y aura très peu de travaux sur le corps de la tour. Le socle sera la seule opération significative de soustraction/addition. 14 000 m³ de béton et 1 600 t d’acier seront ainsi économisés, ce qui représente 7 000 t de CO2 évitées, l’équivalent à 32 millions de km parcourus en voiture ! L’enveloppe vitrée actuelle, « très peu performante », sera remplacée par des baies ouvrantes permettant de ventiler naturellement les logements. Et le bâtiment sera ré-isolé par l’extérieur. Jusque-là chauffé aux énergies fossiles, il sera raccordé au réseau de chaleur urbain de Nantes Métropole, alimenté à 84 % par des énergies renouvelables et de récupération locale. Un système de récupération de chaleur sur les eaux grises du bâtiment doit aussi permettre de réintroduire une partie des calories de l’eau chaude dans la production de chauffage. Et tous les systèmes qui produisent du chaud et du froid seront équipés de pompes à chaleur. L’ambition est de supprimer le recours à toute énergie fossile. Durant le chantier, le recours au réemploi sera aussi massif. Deux tiers des matériaux réemployables seront réinjectés dans le projet, un tiers sera réinvesti dans des filières locales ou nationales. Dotée à l’origine de six parkings, l’édifice fera, enfin, plus de place aux mobilités non polluantes. Les cinq niveaux actuels de stationnements seront recomposés pour loger plus de 250 places vélo, et 160 places pour les voitures (deux fois moins qu’aujourd’hui).
Même si la nature ne sera pas visible sur l’ensemble de la tour, les architectes de PCA-Stream et Magnum ont choisi de végétaliser au maximum des possibilités le toit de l’hôtel et le sommet de la tour, pour rafraîchir l’espace et pour favoriser la biodiversité. La façade de l’hôtel sera habillée de plantes grimpantes et de nichoirs pour les oiseaux et les coléoptères. Des refuges sont même prévus sur les toits pour accueillir les faucons pèlerins. La transformation de la tour sera aussi l’occasion de repenser les espaces publics avoisinants, une fois le chantier de réhabilitation achevé. La place Bretagne pourrait ainsi être valorisée, végétalisée, adaptée aux enjeux climatiques et aux effets venturi, et la topographie améliorée pour faciliter l’accessibilité.
La Tour Bretagne est une copropriété. Les travaux et études seront donc financés par cette copropriété. Le groupe Giboire, qui a acquis la majorité des parts (77 %) financera le projet de réhabilitation, estimé à 135 millions d’euros, sur ses fonds propres et avec des prêts bancaires. Nantes Métropole, copropriétaire du bâtiment, participe à la dépollution à hauteur de 1,5 M€, avec l’État qui apporte 3,5 M€ dans le cadre du Fonds vert. La Métropole contribuera également, à hauteur de ses parts (19 %), pour réaliser les espaces ouverts au public (belvédère, lieu culturel et convivial, espace dédié aux activités sociales et solidaires).
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