Armel Tripon navigue sur du carbone déclassé

Publié le 23 déc. 2025

Dernière mise à jour 23 déc. 2025

Le navigateur nantais a réussi son pari de construire un bateau de course performant avec du carbone déclassé de l’aviation. Aux couleurs de l’association les P’tits Doudous, l’Imoca a déjà fait un podium quelques mois après sa mise à l’eau.

  • Armel Tripon sur son Imoca aux couleurs de l’association les P’tits Doudous, dont il est le parrain depuis 2018. © Jean-Louis Carli

« Une date limite de consommation pour l’aviation »

Armel Tripon n’est pas tombé dans la marmite de la navigation quand il était bébé mais à 19 ans, avec des amis de lycée. « Une vraie révélation ! J’ai décidé d’en faire mon métier. » Il prend le départ en 2001 de sa première course au large à la voile en traversant l’Atlantique. Course qu’il gagnera en 2003 et qui lui ouvrira de nombreuses portes, notamment celle du Vendée Globe en 2020 où il finira 11e à bord d’un Imoca (un monocoque). 

« Ce Vendée Globe m’a donné envie de construire un bateau particulier. Nantes Métropole a initié, en 2021, la rencontre avec le technocentre d’Airbus qui chaque année jette à la poubelle une centaine de tonnes de carbone déclassé. Comme pour les yaourts, ce carbone à une date limite de consommation pour l’aviation qui a des normes de sécurité très strictes. Sauf que cette matière garde toutes ses propriétés et peut servir à fabriquer un bateau. » 

Soutien de la Métropole pour la recherche

Après plusieurs années de recherche et développement, financées notamment par le fonds métropolitain d’appui aux innovations de réemploi, et de recherche de financements, la construction de l’Imoca démarre en 2024. Deux tonnes de carbone déclassé sont utilisées. « 70 % du bateau est fabriqué avec cette matière, c’est une première de cette ampleur », indique le marin. En juin 2025, l’Imoca est mis à l’eau, aux couleurs de l’association les P’tits Doudous dont Armel Tripon est le parrain depuis 2018. « Je voulais que ce projet soit porteur d’une cause plutôt que d’une marque. L’idée était de changer ma manière de naviguer, pour un projet qui a du sens pour moi et ainsi de donner de la visibilité aux P’tits Doudous. »

Cette association, née à Rennes en 2011, améliore le vécu des enfants pendant leur passage au bloc opératoire. Grâce à des activités ludiques et numériques, l’anxiété est réduite ainsi que la prémédication et les traumatismes post-opératoires. Chaque enfant est récompensé d’un doudou à la fin de son parcours. « Il existe plus de 170 associations en France, Belgique et Canada, qui se financent en partie par le recyclage des matériaux à usage unique utilisés dans les blocs opératoires », précise Armel Tripon.

Un modèle à répliquer

Après avoir traversé deux fois l’Atlantique, fait un podium sur sa 1ère course et rivalisé en termes de vitesse avec ses concurrents, le navigateur nantais est fier de son Imoca. « Il attise la curiosité, donne envie au secteur de se pencher sur le sujet. C’était mon objectif, de pouvoir créer un modèle qui entraîne d’autres initiatives, pour montrer que l’on peut allier performance sportive et environnement. »

Armel Tripon sur son Imoca les P’tits Doudous reprendra la mer en mai à Brest puis sur la Route du Rhum en novembre.

  • 2 024 année de création de l’Imoca P’tits Doudous
  • 5 salariés
  • 100 000 euros reçus du fonds métropolitain d’appui aux innovations de réemploi

Quand Nantes Métropole soutient les innovations dans le réemploi

Imoca les P’tits doudous figure parmi les structures soutenues dans le cadre du fonds métropolitain d’appui aux innovations de réemploi, voté en octobre 2024 en conseil métropolitain et doté de 1 million d’euros. L’ambition ? Soutenir le développement de projets innovants de réemploi industriel. Cette démarche est déjà engagée au sein de quatre filières économiques stratégiques : l’industrie (et les matériaux composites carbone), la mode durable, le numérique responsable et le secteur de la construction. La collectivité a en outre lancé la charte Nantes, terre de réemploi, signée par près de 90 acteurs à ce jour (entreprises, acteurs institutionnels, associations…), pour faire émerger une filière locale.