En France, la protection des espèces sauvages fait l’objet d’arrêtés ministériels spécifiques pour chaque groupe biologique (reptiles, oiseaux, amphibiens, mammifères…). Ces arrêtés protègent certaines espèces sauvages, en interdisant la destruction des individus, de leurs habitats de repos ou de reproduction. La surveillance des espèces menacées fait, elle, l’objet d’une liste rouge établie par le comité français de l’UICN et PatriNat, le Centre d’expertise et de données sur le patrimoine naturel français. Ces deux répertoires ne sont pas liés, ainsi une espèce menacée n’est pas forcément protégée, et l’inverse également, une espèce non menacée peut être protégée. Sur le site de Babinière, le suivi et la compensation concernent uniquement des espèces protégées, et non menacées.
Avant sa phase chantier, le projet Babinière a été soumis à évaluation environnementale et autorisé parce qu’il présente un intérêt public majeur dans le développement des transports en commun et la transition de nos modes de déplacement sur la métropole : il renforcera l’accessibilité de la ligne 1 depuis le nord-ouest de l’agglomération, sans avoir à passer le périphérique ou l’Erdre, et permettra l’accueil des nouveaux tramways de grande longueur de la métropole. L’autorisation préfectorale a été prise suite à une étude d’impact et une enquête publique qui s’est conclue par un avis favorable sans réserve de la commissaire enquêtrice, notamment car l’impact environnemental a été dûment étudié et suivi de mesures de réduction et de compensation environnementale engageant le maître d’ouvrage, Nantes Métropole.
L’écologue mobilisé sur trois suivis faunistiques
Missionné par la Semitan, maître d’ouvrage délégué de l’opération, l’écologue Hugo Jame assure l’inventaire, plusieurs fois par an, des espèces qui vivent ou transitent sur le site. L’inventaire permet le suivi de l’avifaune (les oiseaux) sur 2 points d’écoute, des reptiles sous 3 plaques à reptiles et des chiroptères (les chauve-souris) par 3 enregistreurs d’ultrasons. Quelles espèces protégées l’intéressent plus particulièrement sur ce site en bordure de zone humide ? Le Lézard des murailles, le Lézard à deux raies, l’Orvet fragile (une espèce de lézard dépourvu de pattes), les chauves-souris et la cisticole des joncs, un petit passereau.
« En août dernier, avant le lancement du chantier, nous sommes venus vérifier que la cisticole des joncs avait fini de nicher, et que les individus présents sur le site de Babinière étaient bien en mesure de s’envoler lors des opérations de terrassement », explique Hugo Jame. Les types d’inventaire mis en place permettent de suivre la présence des espèces sur site. On vérifie ainsi que les mesures d’évitement et de réduction des impacts, mises en place pendant le chantier, fonctionnent et que les espèces qui étaient présentes en bordures sont bien toujours là.
Ce qui nous importe dans la préservation des populations d’oiseaux sur site, c’est la nidification, qui s’opère durant le printemps et l’été. L’habitat favorable à cette nidification est l’objet même de la mesure de compensation : si un habitat potentiel ou environnement naturel est détruit sur le site, il est recréé ailleurs pour permettre l’accueil des espèces qui le recherchent pour nicher.
Recréer un nouvel habitat favorable à la nidification
À Port-Barbe, tout près de Babinière, la Ville de Nantes a mis à disposition de Nantes Métropole plus de 4 ha de terrain, auparavant dévolu à la pratique du swin-golf, pour aménager un espace propice à la nidification de la cisticole des joncs. La compensation environnementale vis-à-vis de la destruction d’espace de nidification de la cisticole des joncs se traduit par la gestion d’une jeune prairie d’herbes hautes afin de la rendre favorable à la nidification de l’espèce, donc en ne fauchant que tardivement dans l’année. Le site de compensation fait lui aussi l’objet d’un suivi dans le temps.
Sur le site de Babinière, la zone dont nous assurons le suivi se situe en périphérie du chantier, avec le maintien d’un corridor vert le long du périphérique et à l’aval, près du ruisseau. Lors de nos points d’écoute pour les oiseaux, on inventorie les espèces qu’on observe aussi bien à la vue qu’à l’ouïe. Au printemps, les contacts se font principalement à l’ouïe grâce aux mâles, qui chantent pour marquer leur territoire. Or, s’ils marquent un territoire c’est qu’ils ont un nid avec une femelle et des jeunes. En principe on considère que pour chaque mâle chanteur identifié il y a un couple. Dans le protocole “impacts et mesures”, quand les bâtiments seront faits, des écologues pourront revenir à Babinière et, par exemple, mesurer l’impact des éclairages nocturnes sur toutes les espèces (les chauve-souris, les rapaces nocturnes, les insectes…). La mission de l’écologue se poursuit bien après le chantier.