
Tête Haute ? C’est l’aventure de deux frères passionnés de bière. « Nous étions brasseurs amateurs dans notre cuisine depuis quinze ans et nous avions envie de mettre cette passion au service d’un projet à impact social », racontent Fabien et Samuel Marzelière. Ce projet à la fibre sociale s’est concrétisé en 2018, après une période d’incubation aux Ecossolies, le réseau de l’économie sociale et solidaire à Nantes, et l’arrivée d’un troisième associé, Guillaume Leroux. Comme dans toutes les brasseries, Tête Haute fabrique des bières - 3000 hectolitres environ par an - vendues en fûts, en bouteilles et en canettes distribués essentiellement dans la région. Sa particularité : une grande partie des salariés est en contrat d’insertion. Encadrés par les salariés permanents, Chantal, Slava, Gaël et les autres découvrent le brassage et reprennent contact avec le monde du travail, « sans pression ».
« Ici, ils relèvent la tête »
« La plupart ont un parcours chaotique », explique Fabien, éducateur spécialisé de formation. Jeunes sortis du système scolaire sans diplôme, réfugiés, salariés en fin de carrière, ballottés de petits contrats en emplois précaires, ou encore victimes de « burn-out »… « Ils ont besoin de reprendre confiance. Ici, ils relèvent la tête en apprenant les règles d’hygiène et de sécurité, le respect des horaires, le travail en équipe, la conduite de ligne, la préparation de commandes… ». Des compétences transférables ensuite dans l’agroalimentaire, la logistique, ou encore le monde agricole. La brasserie possède en effet, à quelques encablures de son site de production, sa propre houblonnière en agriculture biologique. « Elle permet d’accompagner les salariés vers des savoir-faire utiles dans le maraîchage et la viticulture, qui ont des besoins importants dans la région nantaise », précise Fabien.
Un tremplin vers l’emploi
Après 24 mois maximum de parcours d’insertion, la grande majorité des salariés retrouve le chemin de l’emploi. « Certains travaillent dans la petite-enfance, l’un est devenu mécanicien, un autre soudeur… Leur passage ici est avant tout un tremplin vers l’extérieur », explique Fabien. Depuis son lancement en 2018, Tête Haute a accompagné une quinzaine de salariés en insertion. Depuis peu, une gamme spéciale de bières, baptisée Pow Wow, valorise leurs parcours, avec des canettes à leur effigie et des portraits sonores en podcast où ils partagent leur histoire. « L’objectif est qu’en fin de parcours, chaque salarié en insertion créé sa propre recette de bière avec notre zythologue (ndlr, la personne qui, comme un œnologue pour le vin, élabore la bière) et qu’il la brasse en autonomie ».
Une brasserie trois plus plus grande
Installée depuis ses débuts au Cellier, d’où les deux frères sont originaires, cette brasserie iconoclaste prépare son déménagement dans la métropole nantaise. Sélectionnée par un jury pour rejoindre le projet agricole de Doulon-Gohards, elle investira en 2025 de nouveaux locaux près de la ferme du bois des Anses, avec 2 ha de terres pour planter du houblon. « Cet équipement trois fois plus grand nous permettra de nous déployer au niveau national, indique le jeune braseur de 32 ans. L’objectif n’est pas de faire du volume mais bien de continuer à développer des emplois à impact social ». Les trois associés visent la création de 50 postes, dont une moitié en contrats d’insertion, et comptent bien participer à la vie de ce quartier en plein développement. « Depuis le départ, le projet de Tête Haute, c’est le brassage social ! ».
Lieu de vie et restaurant d’insertion
« L’idée est de faire de la brasserie à la fois une vitrine de l’agriculture urbaine et un lieu de vie », détaille Fabien. Ce « tiers-lieu », ouvert au public, accueillera des activités que Tête Haute teste au Cellier : une cantine solidaire, des ateliers créatifs, des expositions… « Nous aurons aussi une « taproom », un lieu festif où nous vendrons nos bières et où nous organiserons des concerts, des spectacles... ». Le projet intègre également la création d’un restaurant d’insertion, qui permettra de former les salariés à des métiers en forte tension. La construction de la brasserie doit démarrer en 2024, pour une ouverture fin 2025.
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