Le rideau se lève sur un Jardin (encore plus) extraordinaire
Delphine, Florian et Caroline se sont fâchés avec la fast-fashion
Publié le 08 oct. 2025
Dernière mise à jour 08 oct. 2025
La production rapide de vêtements à petit prix a un fort impact environnemental, social et économique. Sans attendre une loi aujourd’hui à l’étude, ces trois habitants de la métropole ont changé leur rapport au textile.
L’industrie de la mode est responsable de 10 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre – plus que les vols internationaux et le transport maritime réunis – tandis que la teinture des textiles est la 2e source de pollution de l’eau au monde. Mais pour le moment, rien ne semble arrêter le raz-de-marée textile : environ 100 milliards de vêtements sont produits chaque année dans le monde et sont portés en moyenne 7 à 10 fois seulement avant d’être jetés !
Cette forte croissance est principalement le fait de la fast-fashion. Faut-il l’encadrer ? Une proposition de loi, prévoyant entre autres la restriction de la publicité en faveur des articles ou des marques concernés, est à l’agenda du Parlement. Dans l’immédiat, des alternatives existent : réemploi, « slow fashion », marques éthiques… Ces trois habitants témoignent de leur expérience.
Pourquoi on s’est lancés
Delphine : « J’ai grandi près de Troyes, une ville connue pour ses magasins d’usine, alors j’étais une ado très consommatrice de vêtements. Je devais avoir une vingtaine de pantalons ! Il y avait de la place dans la maison et on ne se posait pas du tout la question de l’éthique. J’ai commencé à réfléchir à l’industrie de la mode après l’effondrement du Rana Plaza au Bangladesh, où l’on confectionnait des vêtements pour plusieurs grandes marques [1 138 personnes y avaient trouvé la mort en 2013, NDLR]. Et puis à une période, j’ai beaucoup déménagé, clairement ça aide à s’alléger ! »
Caroline : Autour de mes 25 ans, je suis partie à l’étranger et j’ai compris qu’on pouvait le faire en mode léger. J’ai beaucoup réfléchi à mon attachement au matériel, à ce dont j’avais vraiment besoin. C’est une démarche philosophique. Je me questionne toujours sur la possession, la marchandisation, l’économie, la façon dont se construit un prix... »
Florian : « Entre 20 et 30 ans, j’étais dans un mode de vie saisonnier, à faire pas mal de voyages, en mode “roots”... J’ai fini par remettre pas mal de choses en question. J’ai compris que quand j’achetais, je donnais juste mon argent à des marques. Je n’en avais plus envie. »
Ce qu’on a changé
Florian : « Je limite au maximum mes achats et ça fait 6 ou 7 ans que je privilégie la seconde main. J’achète à 95 % en friperie : on y trouve du quasi-neuf, c’est confort, même si les rayons hommes sont moins fournis. Je ne prête pas spécialement attention à la qualité ou à l’origine, je suis plutôt dans l’idée de redonner vie à un vêtement qui a été jeté. Je peux aussi chercher de la seconde main sur une plateforme en ligne, quand j’ai un besoin bien précis. En neuf, je me limite aux sous-vêtements et à du merchandising en concert – mais là, c’est plutôt comme acheter un souvenir. »
Delphine : « Moi aussi, j’achète beaucoup moins qu’avant et surtout en seconde main. Pour du classique, c’est assez simple, et on a de la très bonne qualité à des prix défiant toute concurrence. Si c’est arrivé en friperie, déjà, c’est que ça tient le coup ! Alors qu’un pull acheté à 20 €, on sait qu’il ne va pas tenir la durée. »
Caroline : « Ou une paire de chaussures qu’on jette au bout de 2 mois, comme ça nous est arrivé ! Cette fast-fashion, ça m’est insupportable. Si j’achète du neuf, je privilégie la qualité, le durable, le
naturel. Comme j’achète peu, je m’y retrouve niveau budget. Et puis il est toujours possible d’apprendre à coudre ! »
Delphine : « Tout à fait d’accord. Si je veux un beau jean de qualité, j’achète une marque made in France, qui privilégie les circuits courts. C’est un peu cher mais comme je le fais tous les 5 ans... »
Ce qu’on en retient
Caroline : « Même si on achète une fripe, il faut regarder la fibre, la matière, voir d’où ça vient. Et toujours se poser la question du besoin. »
Florian : « Ça implique de déconstruire ce dans quoi on a baigné, cette culture de la consommation. En réalité, ça se fait naturellement, le réflexe d’acheter du neuf part assez vite et aujourd’hui je ne ressens pas du tout de frustration ! Avec la seconde main, tu mets moins d’argent et tu peux trouver du plus qualitatif, du plus durable. Au final, tu t’en sors mieux, et comme le prix n’est pas un problème, tu peux essayer des choses, sortir de ton style habituel. »
Delphine : « Il faut rester léger. Si j’achète un vêtement, j’en enlève un dans mon placard. Je me suis aussi rendu compte qu’en fait, on avait tendance à mettre tout le temps les mêmes vêtements. Ce que je n’ai pas mis dans l’année, maintenant, je le dégage ! »
Florian : « C’est la fameuse loi des 10 % : on a plein de fringues dans notre garde-robe, mais on n’en met qu’une petite partie. Conclusion, il faut se séparer de ceux qu’on garde en stock. »
Delphine : « Quand je vais dans un magasin où je vois des piles de vêtements neufs identiques, ça ne me fait plus du tout envie. Et puis j’ai compris que quand je consommais, c’était aussi pour être à la mode. Alors qu’en fait, la plupart des gens ne font pas du tout attention à la façon dont on s’habille ! »
Les coups de pouce
Vous souhaitez acheter neuf mais durable ? Privilégiez les marques éthiques, boutiques de créateurs… Le Guide des commerçants de Nantes centre ville propose une sélection d’adresses engagées et exclusives.
Vous préférez la seconde main ? Friperies et points de vente d’occasion se sont multipliés ces dernières années. À côté des boutiques privées, vous trouverez :
• les structures d’insertion : Emmaüs à Bouguenais, L’Homme debout à Saint-Herblain, Miss Récup & recycle à Rezé, friperies Ding Fring du Relais...
• les boutiques solidaires : Croix-Rouge, Secours populaire...
• les recycleries : le Transistore à La Chapelle-sur-Erdre, Le P’tit vestiaire à La Montagne, et à Nantes la Boîte à récup, la Boutique des Dervallières, la Boutik, le Solilab, Supporterre...
Ces adresses sont regroupées dans le guide Nantes durable et solidaire des Autres possibles (15 €).
Tentez l’upcycling, qui consiste à réparer et donner une 2e vie à ses vêtements. Pour apprendre, rapprochez-vous des associations proposant des cours de couture, des Maisons de quartier ou centre socioculturels.