2023-05-02T16:31:38Z

Commémorations du 10 mai : les jeunesses engagées

Publié le 02 mai 2023

Échanger sur les enjeux de société, travailler au devoir de mémoire, sensibiliser, débattre, mais aussi et surtout développer son esprit critique, voilà les objectifs des actions de médiation menées auprès de jeunes, à l’occasion de la journée nationale des mémoires de l’esclavage.

Photo d'une élève de l'Ecole de la 2ème Chance au Memorial de l'abolition de l'esclavage à Nantes
Elève de l'Ecole de la 2ème Chance au Mémorial de l'abolition de l'esclavage à Nantes

Le 10 mai, c’est la "journée nationale de commémoration des mémoires de la traite, de l'esclavage et de leur abolition". Pour y contribuer, tout au long de l’année, des projets de médiation culturelle sont menés sur le territoire par les partenaires associatifs et éducatifs auprès d’élèves du secondaire. Le point d’orgue en est la cérémonie officielle qui se tiendra le 10 mai, de la passerelle Victor Schoelcher au Mémorial de l’abolition de l’esclavage. Parmi les neufs initiatives, focus sur celles de l’École de la 2ème Chance et celle du Lycée Monge-La Chauvinière.

« In ! Zot té i kri. Yaho, gli ! Epi klak sabouk desi nout do*» récite Mickaël, accent créole réunionnais parfait, face à la citation d’Axel Gauvin qui s’affiche sur le panneau au Mémorial de l’Abolition de l’Esclavage de Nantes. Mickaël est l’un des huit élèves de l’École de la 2ème Chance participant au projet annuel de médiation culturelle portée par l’association « le Dernier Spectateur ». Au programme : une visite des lieux de mémoire nantais, des maisons d’armateurs de l’île Feydeau, aux hôtels particuliers du quai de la Fosse, pour enfin aboutir au Mémorial. L’objectif final comme le détaille Brahim est « d’écrire un texte et de le lire devant tout le monde le 10 mai ».

Plus que le simple aboutissement final, l’action menée par « le Dernier Spectateur » auprès des élèves est un travail pour comprendre l’esclavage dans le passé, mais aussi dans le présent, à travers la notion d’esclavagisme moderne largement abordée dans les discussions. Pour cela, plusieurs outils sont utilisés : la photographie, mais aussi l’écriture. « Les jeunes s’expriment en fonction de leur sensibilité, ils peuvent écrire, mais aussi danser, rapper, dessiner. C’est la libre expression qui prévaut » indique Christelle Lader, la référente sociale et culturelle de l’école.

Pendant que les jeunes lisent les panneaux du Mémorial, en français, en anglais, ou bien en créole réunionnais, mahorais ou portugais, Stéphane Anizon du « Dernier Spectateur » évoque déjà le travail de restitution : « on ne sait jamais quelle forme cela prendra, mais je vois qu’ici, la graine des langues à été semée. On pourra peut être travailler sur une forme polyphonique, en plusieurs langues. Quoiqu’il arrive c’est eux qui en décideront. »

Photo des élèves des lycées Monge-La Chauvinière (Nantes) et Faustin Fléret (Morne-à-l'Eau - Guadeloupe) brandissant un texte
Elèves des lycées Monge-La Chauvinière (Nantes) et Faustin Fléret (Morne-à-l'Eau - Guadeloupe)

Du côté de Nantes Nord, au Lycée Monge-La Chauvinière, la transmission de l’histoire, des mémoires de la traite et de l’esclavage est également l’objectif principal. Le projet mené par Michelle Beaujault et Séverine Pirovano professeures d’histoire et de lettres, a pris ses racines il y a 7 ans, quand deux élèves alors en conflit ont proféré des insultes racistes l’un envers l’autre. L’idée d’un projet de médiation a émergé comme une réponse à cette problématique. Le projet a vu rapidement le jour. D’années en années, il s’est structuré et a pris une dimension transatlantique lors de contacts noués avec un lycée guadeloupéen.

Le lycée Monge-La Chauvinière s’est ainsi décidé à participer au concours national de la Flamme de l’Egalité sur un projet commun mené avec les lycées Faustin Fléret de Morne-à-l’Eau en Guadeloupe et Lamatsanguine de Libreville au Gabon. De cette collaboration, sont nés une vidéo en 2021 et un clip en 2022, récompensés à chaque fois des prix académiques.

En 2023, le projet a encore évolué, précise Michelle Beaujault : « pour rendre les choses plus concrètes nous sommes partis à la Guadeloupe durant le mois de février avec 13 élèves ambassadeurs, issus de seconde générale et de première professionnelle ». Sur place, le programme s’est révélé bien chargé : atelier danse, visite de sites mémoriels, de musées, mais aussi travail photographique et rencontre avec Sylvie Condé (fille de l’autrice Maryse Condé), Tania de Montaigne et Simone Schwarz-Bart. Le projet de cette année s’est construit autour de la réalisation d’une bande-dessinée, que trois établissements ont travaillée entre eux.

La touche finale a été mise lors de la venue des élèves guadeloupéens à Nantes en préparation des commémorations du 10 mai. Ensemble « ils ont mis en mots, en voix et en rythme les paroles de poètes pour évoquer ce qui a trait à l’esclavagisme moderne » conclut Michelle Beaujault.

Le rendez-vous est donné le 10 mai, à partir de 17h entre le mémorial et la passerelle Schoelcher. pour découvrir la restitution de ces deux projets.


* « Hue ! Ils criaient ! Et claquaient les fouets sur notre dos. Et ronflaient des jurons dans nos oreilles. » Axel Gauvin, Bèf Banna, 1983

Ça peut vous intéresser