Que dit la charte métropolitaine de la donnée ?
Le document dévoilé le 19 juin met en avant quatre engagements de la Métropole : garantir la souveraineté de la collectivité sur ses données ; les protéger ; garantir la transparence ; favoriser de nouveaux usages. Cette démarche constitue une première en France. « Soit les collectivités acceptent de déléguer toute capacité stratégique sur ces sujets à d’autres acteurs, soit le politique revendique d’avoir une vision stratégique, un cadre, des exigences », justifie Johanna Rolland, maire de Nantes et présidente de Nantes Métropole.
Pourquoi la collectivité a-t-elle engagé cette démarche ?
C’est le pendant de la « smart city » et de la place du numérique dans notre quotidien : la production de données explose. Un progrès puisqu'elles permettent d’améliorer les services, favorisent la transparence et facilitent le dialogue citoyen. Mais aussi un enjeu pour les collectivités territoriales, attendues sur la question de l’encadrement de leur usage. La charte lancée par la métropole nantaise se veut « clairement une démarche de régulation ». Elle « vise à poser un cadre d’organisation de la donnée, qui est un bien commun », revendique Johanna Rolland, tout en précisant que « poser des règles, ça ne doit pas être fermer la porte aux innovations, c’est affirmer que l’on a le devoir de s’interroger ».
Les données de Nantes Métropole sont-elles les seules concernées ?
« Cela aurait été la solution de facilité », remarque Johanna Rolland. La Métropole a souhaité aller plus loin : « Le politique fixe un cadre et invite ensuite toutes celles et tous ceux qui s’y retrouvent à signer cette charte ». Une adresse aux nombreux acteurs, notamment privés, qui produisent ou collectent des données sur le territoire. La charte les incite à partager librement ces « données d’intérêt métropolitain ». C’est ce à quoi s’est engagé par exemple le Groupe Lacroix, spécialisé dans les équipements connectés : « La donnée est une ressource illimitée, qui se bonifie dès lors qu’on la partage, note son PDG, Vincent Bedouin. Avec la charte, cette matière première reste un bien public, disponible pour tous, et c’est fondamental pour résoudre les enjeux de la société de demain : énergie, environnement, mobilité... »
Sur quels points la charte va plus loin que la législation existante ?
Lors du point presse où a été lancée la charte, le 19 juin, Johanna Rolland a cité deux exemples : « Nous nous engageons à publier les algorithmes que nous utilisons », a-t-elle expliqué, en prenant pour exemple le calcul de la tarification sociale de l’eau. La charte se saisit aussi des applications de l’intelligence artificielle, « un sujet qui monte » : « Nous nous engageons à interdire son utilisation dans la gestion des données publiques sur des cas individuels. » D’autre domaines sont concernés : par exemple sur l’hébergement, imposé sur le territoire national et limité aux données nécessaires à l’accomplissement des missions de la collectivité.
Quelle valeur juridique a la charte ?
Si elle est d’abord une « déclaration d’intention », la charte métropolitaine devrait être annexée à des contrats et à des marchés publics. Des clauses spécifiques lui donneront une valeur réglementaire lorsque des délibérations lui feront référence. Ce travail a déjà été entamé avec des délégataires de service public notamment.
Qui a été consulté pour préparer cette charte ?
« Nous avons souhaité nous appuyer sur les citoyens, concernés au premier chef, pour avoir leur point de vue sur les usages de la donnée », explique Bassem Asseh, adjoint nantais au dialogue citoyen. La Métropole avait organisé des temps de débat consacrés au wifi public en 2017 et aux « règles du jeu des rues connectées de l’île de Nantes » en 2018.»