Le chiffre mérite d’être rappelé : en France, 32 % des émissions de gaz à effet de serre proviennent du secteur des transports, pour plus de la moitié du fait des voitures particulières. Première source de pollution aux particules fines, la voiture occupe aussi une place disproportionnée dans l’espace urbain, au détriment de modes de déplacement plus écologiques et du cadre de vie. Conséquence ? Les politiques publiques de mobilité sont au centre des enjeux de transition écologique, de santé publique et de qualité de vie.
Pour anticiper et orienter les évolutions dans le domaine, Nantes Métropole s’est dotée d’un Plan de déplacements urbains 2018-2027 (PDU). Son ambition : permettre à toutes et à tous de se déplacer, dans les meilleurs conditions, en préservant l’environnement, le cadre de vie, la santé et le pouvoir d’achat. Le document fixe des objectifs pour chaque mode de déplacement – les fameuses « parts modales » – et détaille les actions pour y parvenir. La sortie du tout-voiture est actée : alors qu’en 2015, 36 % des déplacements à l’intérieur du périphérique se faisaient en voiture individuelle, le PDU vise les 21 % à l’horizon 2030.
La collectivité agit tout autant sur les infrastructures, les services (comme la marque mobilité unique Naolib créée en 2023, la gratuité le week-end en 2021), que sur le changement des habitudes des habitantes et habitants. Les moyens sont là. Sur le mandat, plus d’un milliard d’euros sont consacrés à la « révolution des mobilités », selon les mots de Johanna Rolland. Soit le premier poste d’investissement de la Métropole. Un effort qui s’observe sur le temps long, puisque les projets de mobilité – en particulier pour les transports en commun – doivent être anticipés sur plusieurs années.
Le Covid, un accélérateur
Nantes a fait de la crise du Covid un accélérateur, notamment grâce à la création d’aménagements provisoires comme des voies cyclables. La pandémie a aussi changé la donne de façon plus globale. Le télétravail, même s’il se concentre sur certains jours, s’est installé dans les habitudes de travail. L’achat en ligne s’est considérablement développé, avec plus de livraisons et moins de trajets. Au final, le nombre de déplacements par jour et par habitant dans la métropole nantaise est passé de 4,2 à 3,4 entre 2015 et 2022, soit une baisse de 20 % – ce qui est conforme au reste du pays.
Mais dans le même temps, la population a continué de grimper : + 1,2 % par an. Nous étions 636 000 habitantes et habitants en 2018, nous sommes 695 000 en 2025. À cette croissance de la population, autant de besoins de déplacement supplémentaires, et autant de réponses à apporter !
Ce qu’il reste à faire
Sept ans après le lancement du PDU 2018-2027, la métropole nantaise passe progressivement du tout-voiture à des modes de déplacements plus durables : transport collectif, vélo et marche. Les enquêtes pour mesurer précisément ces évolutions – en particulier l’enquête EMC2, réalisée tous les 10 ans à l’échelle du département – ne livreront leurs résultats qu’en
automne. Mais les premiers indicateurs témoignent d’une « bonne dynamique », note Bénédicte Levionnnais, directrice du département des mobilités à Nantes Métropole. Avec quelques nuances. Si la pratique du vélo a augmenté de 10 % par an depuis la pandémie, les marges de progrès restent importantes pour le covoiturage : « Les comportements évoluent lentement, malgré les nouvelles voies dédiées, les aides aux covoitureurs... ».
Sur d’autres leviers importants, comme la logistique urbaine (flux de marchandises en ville), la Métropole n’a pas de compétences en propre mais agit à son niveau : « Notre rôle consiste à mettre en relation les acteurs du territoire et animer des collectifs de travail. » Le développement des transports en commun et du vélo s’accompagne d’importants chantiers, « un passage obligé si l’on veut de nouvelles infrastructures, de nouvelles destinations, un meilleur maillage ». Pour diminuer les contraintes, des mesures d’accompagnement sont déployées : soutien aux commerces, médiation, communication, renforcement des offres alternatives, etc.
Autre difficulté pour l’action publique : le territoire d’intervention. Les déplacements les plus polluants sont ceux effectués en voiture sur de longues distances, au-delà des limites de Nantes Métropole. Celle-ci doit donc imaginer des solutions avec les collectivités voisines : intercommunalités, Département, Région. « C’est tout l’enjeu du futur service express régional métropolitain Nantes Saint-Nazaire, le SERm, qui doit coordonner nos actions et sur lequel nous travaillons déjà », précise Bénédicte Levionnais. Les financements, ceux de l’État notamment, sont ici au cœur des préoccupations.
En chiffres
14
nouvelles rames de tramway circulent, sur les 61 attendues d’ici 2027
30
La vitesse maximale à Nantes (sur plus de 80 % de la voirie), depuis la généralisation de la Zone 30 en 2020
8
nouveaux hectares d’aires piétonnes livrés en 2025 (pour atteindre un total de 84 ha)
Comment la Ville fait-elle cohabiter piétons, cyclistes et autres modes de transport ?
Simon Citeau, adjoint aux déplacements doux, et Aurélien Boulé-Fournier, conseiller municipal délégué au développement de la pratique cyclable et au suivi des associations cyclistes : « Aujourd’hui, à Nantes, un déplacement sur deux est inférieur à 3 km, et 40 % de ces trajets sont effectués en voiture. Pour sortir de cet écueil, développer les alternatives et réduire nos émissions de CO2, il est nécessaire de redistribuer profondément et plus justement l’espace public. Cela passe par la mise en place de plans de circulation visant à baisser le trafic de transit et à améliorer l’accès des riverains. Pour développer la pratique cyclable, les vélos ne doivent pas avoir à négocier avec les voitures leur place sur la chaussée. Nous construisons un réseau qui maximise la séparation entre les cyclistes et les flux motorisés, avec des rues apaisées à très faible trafic et des pistes cyclables sécurisées sur les grands axes structurants. Les conflits d’usage entre les vélos et les piétons – encore trop nombreux – sont traités dans notre schéma stratégique piéton métropolitain : la séparation des flux est l’une des clés pour garantir des cheminements sécurisants pour les piétons. »