Fabrique de nos villes : qu’est ce qui a changé depuis le Grand débat ?
Publié le 25 juin. 2025
Dernière mise à jour 25 juin. 2025
Un an après après l’adoption de la feuille de route déclinant les engagements pris par Nantes Métropole après le grand débat de 2023, plus de 80 % des actions sont engagées. Réunis en forum, 33 acteurs bénévoles suivent leur avancée. Le 23 juin, ils ont fait un premier point d’étape sur le chemin parcouru.
Architectes, professionnels du logement, acteurs associatifs du social ou du monde de la culture… Depuis l’automne 2024, une trentaine de volontaires issus de la société civile, aux profils variés, sont engagés dans le Forum des acteurs de la fabrique de la ville. Leur rôle ? Évaluer, de manière transparente, l’avancée des 97 actions adoptées par les élus en avril 2024 après le Grand débat sur la fabrique de nos villes. Suivi par 30 000 personnes, ce temps fort démocratique avait révélé une adhésion large des citoyennes et des citoyens à l’enjeu de bifurcation écologique. « Le défi du climat nous oblige à penser et à aménager notre métropole autrement, rappelle Johanna Rolland, présidente de Nantes Métropole. La feuille de route que nous avons adoptée il y a un an en réponse à ce débat guide notre action pour réinventer, ensemble, notre manière de penser et de transformer la ville afin de la rendre durable, écologique et solidaire. »
« Une transformation profonde est engagée »
Concrètement, qu’est-ce que ça a changé ? Nommés pour trois ans, les membres du forum ont dressé un premier état des lieux des transformations engagées, lundi 23 juin à l’occasion de leur première séance plénière. Face à ces citoyennes et citoyens, qui saluent « la qualité d’échange, la liberté de parole et le croisement des points de vue », Johanna Rolland l’affirme : « Il y aura un avant et un après grand débat. Il a engagé une transformation profonde de notre action publique et nous permet de porter un nouveau regard sur nos projets pour s’assurer d’être à la hauteur sur les questions de sobriété carbone, de nature en ville, de place des enfants... »
Plus de 80 % des actions déjà engagées
La bifurcation écologique est déjà effective, assure l’élue : « Un seulement un an, plus de 80 % des actions que nous avons votées sont engagées. Certaines sont même déjà réalisées, comme le déploiement du logement en bail réel solidaire pour permettre aux classes modestes de devenir propriétaires, le dispositif d’aide au maintien et à l’installation des professionnels de santé sur des secteurs en tension ou encore la règle du 3/30/300 dont on a fait le principe de tout aménagement pour renforcer la place de l’arbre et de la nature en ville (lire ci-dessous). » Plusieurs projets urbains ont été repensés en profondeur à l’aune de ce grand débat : la transformation du parking Gloriette Petite-Hollande en parc arboré, l’aménagement du secteur Pirmil Saint-Jacques, l’évolution du projet Vert Praud à Rezé pour préserver plus de nature, ou encore de l’ouest de l’île de Nantes pour créer un grand parc en bord de Loire…
« La hiérarchie de nos priorités a changé et donne une autre couleur à la transformation de nos villes, résume Pascal Pras, vice-président en charge de l’urbanisme durable et de l’habitat. Face aux défis actuels, l’urgence climatique, la crise de confiance démocratique, la crise du logement, cette feuille de route est une petite loi, que l’on a co-écrite avec les habitants et les acteurs de la fabrique de la ville, pour aller plus vite et plus loin, ensemble. »
5 avancées pour une ville écologique et solidaire
1. Plus de nature sur l’espace public
L’un des premiers impacts tangibles concerne l’amplification de la nature et du vivant dans la ville. « Cette feuille de route a enclenché à la fois une accélération dans certains domaines et une redirection de certains projets », explique Tristan Riom, vice-président en charge du climat, de la transition énergétique et de la résilience. Exemples d’accélération ? Nantes a doublé les objectifs de son plan « pleine terre » pour débitumer et végétaliser 14 hectares au total (contre 7 ha prévus initialement). Cette renaturation favorise la perméabilité des sols, rafraîchit, apporte de l’ombre de la biodiversité… Pour aller encore plus loin, la charte métropolitaine des arbres, adoptée en avril 2024, fait du « 3/30/300 » un principe de tout aménagement. Objectif ? Que chaque habitant puisse voir au moins 3 arbres depuis son habitation, profiter d’au moins 30 % de couverture arborée en se promenant dans son quartier ou sa commune et bénéficier de lieux arborés et ombragés à moins de 300 m de son domicile. Au chapitre des redirections, Tristan Riom cite encore « le choix récent de remplacer un projet de bureaux programmé sur l’île de Nantes par un jardin, avec 5000 m² de canopée supplémentaire à terme. »
2. Des constructions plus économes et durables
La Métropole affiche sa volonté de transformer les villes en misant sur la sobriété et l’économie circulaire. L’enjeu est de concevoir une ville plus compacte, économe en ressources et respectueuse du vivant, en favorisant la réhabilitation plutôt que la construction neuve, en partageant les usages du foncier et en développant les opérations vertueuses. Parmi les actions déjà engagées : le déploiement d’un « référentiel frugal bas carbone » pour l’aménagement, l’accompagnement de plusieurs projets de surélévation de bâtiments existants permettant de produire de nouveaux logements sans consommer d’espace au sol, ainsi qu’un effort sans précédent de maîtrise foncière avec une enveloppe de 60 millions d’euros supplémentaires pour acquérir des terrains et peser sur la mutation de secteurs clés : construction de logements sociaux, équipements publics, renaturation requalification des entrées d’agglomération…
3. Des services plus proches des habitants
Autre engagement fort pris à l’issue du grand débat : rapprocher les services essentiels des habitants en développant des centres-villes et centres-bourgs vivants, accessibles, afin de faciliter la vie quotidienne, améliorer l’accès aux soins, renforcer le commerce de proximité et développer les services publics locaux. Pour y parvenir, des actions concrètes sont en train de voir le jour. Exemple ? La modification du plan local d’urbanisme métropolitain (PLUm) pour renforcer les commerces de proximité et limiter le développement des zones commerciales de périphérie.
L’idée est aussi de se saisir de la culture pour activer le lien social. Pour se faire, la feuille de route prévoit d’intégrer des projets artistiques dès la conception des projets urbain, à l’image de la résidence Royal de Luxe sur le Grand Bellevue, ou encore du Pôle des arts nomades qui s’ancrera dans le quartier Doulon-Gohards.
4. Plus d’égalité : des logements pour tous
Face à la crise du logement, la Métropole affiche une ambition claire : garantir le droit à la ville pour toutes et tous, en conjuguant justice sociale et résilience. En matière d’habitat, la feuille de route a permis de massifier la construction de logements en Bail réel solidaire (BRS). Ce nouveau dispositif dissocie l’achat des murs et du terrain pour rendre l’accession à la propriété accessible aux ménages modestes, tout en contribuant à lutter contre la spéculation immobilière. Les chiffres témoignent de cette accélération : en 2023, 246 logements en BRS avaient été agréés. Leur nombre a doublé dès 2024 (469) et devrait atteindre 570 en 2025. Pour renforcer cette offre aujourd’hui réservée aux ménages les plus modestes, la Métropole vient d’engager une étude afin d’élargir son éligibilité aux classe moyennes et intermédiaires.
5. Des projets imaginés avec la population
Transformer la ville, c’est aussi placer la démocratie, le pouvoir d’agir des habitants et l’expérimentation citoyenne au centre des projets. Plusieurs démarches ont été lancées pour traduire cette ambition en actes. Exemple ? Le devenir de l’Hôtel-Dieu. De septembre à décembre 2024, 2700 personnes ont contribué à imaginer le devenir de ce site emblématique en participant à une démarche « d’inspiration citoyenne ». La collectivité a lancé plusieurs autres expérimentations sur des sites stratégiques, pour tester les usages, apporter une première offre de services pendant le temps que met le projet à sortir de terre : l’ancienne École des beaux-arts à Nantes devenue l’Atelier Dulcie-September, la friche Le Champ des possibles à Rezé, la Station Mendès du Grand-Bellevue à Saint-Herblain ou encore le site Kertucks à Orvault.
Le regard du Forum sur l’évolution des lotissements
Le Forum des acteurs de la fabrique de la ville est un nouvel espace de dialogue permanent entre la collectivité et la société civile. Ses membres sont chargés de suivre et d’évaluer l’avancée des engagements de la feuille de route, mais aussi de nourrir la réflexion sur quelques actions ciblées. Après avoir confronté les points de vue sur la formation et les apprentissages de la ville à destination des professionnels et des citoyens, au second semestre 2025, ils questionneront l’évolution des tissus pavillonnaires existants. Un « un sujet vaste et assez sensible, estiment-ils. Cela questionne la densification, la mixité sociale et des âges, la végétalisation des cœurs d’îlots ou encore les espaces de convivialité à trouver... ». Ils devront travailler sur la sous-occupation de ces logements individuels, en particulier ceux habités par des propriétaire âgés dont la maison ne répond plus à leurs attentes (difficultés d’entretien, coûts de l’énergie, isolement…). Un véritable levier pour répondre aux besoins dans un contexte de crise du logement et à l’heure du zéro artificialisation.