Orvault
« On peut cultiver en bio sur des surfaces réduites »
Des micro-fermes bio, et si c’était ça le modèle agricole de demain ? Jean-Michel Le Guen assure que « c’est une des réponses face à la rareté du foncier ». Ce paysagiste de formation a installé la sienne en 2018 à Orvault. Son nom : la ferme des anges. « Avec 2 500 m² de pleine terre, je cultive en bio entre 50 et 100 variétés de légumes et petits fruits que je vends à huit restaurants locaux, un magasin bio et quelques restaurants étoilés », explique-t-il. Cette méthode dite bio-intensive arrive des États-Unis, elle consiste à planter en rangs serrés grâce à un système de planches permanentes où l’on fait tourner les cultures plusieurs fois par an, sans aucun traitement. En mettant en application ces principes, sur sa première ferme, Jean-Michel Le Guen a doublé sa rentabilité tout en réduisant de moitié la surface qu’il cultivait alors avec sa femme en Gironde. Le secret ? « On nourrit bien les sols et on les travaille peu ». Ce « jardinier-maraîcher » n’utilise pas de tracteur, juste des outils manuels - un semoir et un microculteur (le modèle réduit du motoculteur) - et il a maillé son terrain de fruitiers. « L’arbre est un allié précieux pour les légumes. Il apporte de l’ombre, ses racines aèrent le sol et ses feuilles en tombant créent de la matière organique qui permet d’intensifier la vie biologique ». Également formateur, Jean-Michel Le Guen œuvre pour que ce modèle fasse école. Depuis 2021, au-dessus de la Ferme des anges, il loue une parcelle à son fils Simon et à sa femme pour créer leur ferme florale. Juste à côté, un espace-test est destiné aux étudiants du centre de formation de la Chambre d’agriculture. Pendant un an, les futurs maraîchers pourront s’y essayer au bio-intensif avant de se lancer.
Plus d’infos : Instagram @microfermedesanges
Couëron
« Sans élevage, il n’y aurait plus nos paysages »
« Si vous avez peur de vous ennuyer dans votre vie professionnelle, devenez éleveur ! » (rires) À 31 ans, Morgane Guillouroux ne regrette pas son choix. Au 1er janvier 2022, cette Finistérienne, ingénieure agronome de formation, a repris la ferme bovine de Didier Chuniaud, éleveur depuis 35 ans à Couëron : 82 hectares, dont 78 ha de prairies, avec 38 vaches laitières et quelques vaches nourrices pour la vente directe de veau. « La ferme, en bio depuis 22 ans, est presque autonome, explique-t-elle. Les vaches sont nourries quasi exclusivement à l’herbe. C’est plus sain, bien adapté à leur anatomie et économe car on n’a pas besoin d’acheter d’aliments pour le bétail ». « Pendant mon cursus, je m’étais persuadée qu’il fallait au minimum 80 vaches pour réussir à en vivre. Mais ce système herbagé est très rentable. Je vise 2000 euros/mois d’ici cinq ans avec la création d’une fromagerie ». Pourquoi Couëron ? : « J’ai rencontré Didier Chuniaud en 2019 lors d’un Café installation organisé par Cap44 (ndlr, une association d’aide à la transmission d’exploitation). Après plusieurs visites et discussions, on a décidé de se lancer et je suis venue vivre à la ferme, d’abord comme salariée pour une reprise en douceur ». Pour conforter son projet, la jeune femme a suivi un stage paysan et bénéficié de 15 000 euros d’aides de Nantes Métropole… La proximité de Nantes a achevé de la convaincre. « C’est un plus pour la vente directe, mais aussi pour le bassin d’emplois. Mon conjoint ne sera pas bloqué s’il veut un jour changer de travail ». Seul problème : la pression foncière. « Il faut préserver les terres agricoles pour ne pas trop grignoter notre outil de travail, insiste Morgane. L’élevage permet de maintenir le bocage et nos paysages, les surfaces en herbe favorisent la biodiversité, limitent l’érosion des sols et les inondations. » Une fonction essentielle aujourd’hui menacée : pour trois départs en retraite, on compte une seule installation de jeune éleveur.
Plus d’infos : Facebook de la Ferme de la Vinaudière
La Chapelle-sur-Erdre
« On est agriculteurs, mais on aime aussi la ville ! »
Rien ne prédestinait ces deux jeunes citadins à devenir paysans. « Jusqu’en 2016, je bossais dans le marketing à Londres, raconte Fanny Perraud, 34 ans. Je ne voulais plus de cette vie, j’avais envie de rentrer dans la région nantaise, où je suis née, pour faire un métier porteur de sens, autour de la nature, de l’alimentation ». Après une reprise de formation pour passer son BPREA (brevet professionnel de responsable d’entreprise agricole), elle rencontre Florian Partyka - 36 ans, « Parisien pure souche » et ancien graphiste - lors d’un stage paysan. Leur envie d’associer maraîchage bio et poules pondeuses en périphérie de Nantes est la même. « On ne voulait pas mettre tous nos œufs dans le même panier, ni se retrouver isolés. On est agriculteurs, mais on aime aussi la ville. Commercialement, c’est aussi plus facile quand vous êtes proches d’un pôle d’habitat important », explique Florian Partika, logé dans une ancienne ferme chapelaine rénovée par la mairie pour permettre aux agriculteurs locaux d’habiter à proximité de leur lieu d’activité. Leur Gaec (groupement agricole d’exploitation en commun) naît en 2021. Son nom ? Plume de courgette. « Grâce à l’AMI de Nantes Métropole, auquel nous avons candidaté fin 2018, on a trouvé 3,5 ha de terres qui avaient déjà été défrichées et préparées par la SCIC Nord Nantes. ». La ferme, installée au milieu de pavillons du village de la Mouline à La Chapelle-sur-Erdre, est opérationnelle depuis l’été 2021. « On vend via une épicerie, un marché de producteurs et plusieurs Amap (association pour le maintien d’une agriculture paysanne) qui nous assurent chacune une trentaine de paniers payés à l’avance. Ce sont des revenus sûrs, rémunérés au juste prix, ça facilite les récoltes et évite de jeter. Comme il n’y a pas d’intermédiaire, c’est aussi moins cher pour les consommateurs ». Fanny ne s’en cache pas : ses revenus ont diminué. Des regrets ? « Aujourd’hui, je suis en phase avec mes valeurs, assure-t-elle. Nos clients, sensibles à l’hyper-local, sont contents. C’est la meilleure des rémunérations ».
Plus d’infos : Facebook Plume de courgette
Des aides pour s’installer
En 2018, la Métropole a lancé un appel à manifestation d’intérêt (AMI) pour aider de nouveaux agriculteurs à s’installer en bio sur le territoire. Animé avec la Chambre d’agriculture, le GAB44, CAP44, la CIAP, Terre de Liens, la Safer et les communes, il s’adresse à toute personne qui souhaite créer ou reprendre une ferme sur la métropole. Les projets retenus bénéficient d’un accompagnement (choix du foncier, étude de marché, formations, etc.) et d’une aide financière pouvant aller jusqu’à 15 000 euros. Depuis sa création, 75 projets ont été accompagnés et 800 000 euros d’aides accordées.
Pour en savoir plus ou candidater, consultez cette page.
Élevage : la revanche des Nantaises
Cette race locale, chassée par l’agriculture intensive, redresse les cornes. Depuis 2015, une association d’éleveurs passionnés soutient la relance de cette vache aux yeux ourlés de noirs, menacée de disparition. Pour faciliter l’installation de jeunes éleveurs, ils ont créé un troupeau-école qui pâture sur des terrains publics et réfléchissent à construire une étable avec le lycée agricole Jules-Rieffel de Saint-Herblain. Objectif : créer une filière 100 % locale de valorisation des produits issus des élevages de Nantaises. Le projet, soutenu dans le cadre du Programme alimentaire territorial et du plan France Relance, devrait aboutir en 2024. « La Nantaise, moins productive que d’autres races, n’est pas reconnue comme une bête à viande, explique Benoît Rolland, éleveur de la ferme des Neuf-Journaux à Bouguenais. Elle fournit pourtant une viande de qualité, goûteuse et persillée, et offre une vraie plus-value environnementale ». Adaptée à son terroir, elle n’a pas son pareil pour entretenir naturellement les prairies humides du territoire.
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