Paul Guo : Je suis commerçant et, comme tous mes collègues, nous sommes en ce moment inquiets concernant la conjoncture économique et l’impact des travaux actuels en centre-ville.
J. R. : À Nantes, on a la chance, et ce n’est pas le fruit du hasard, de pouvoir compter sur un tissu commercial dynamique. Pour le soutenir, j’ai annoncé le lancement d’un grand plan commerce 2025, notamment dédié au centre-ville, et nous venons d’ouvrir un nouvel outil en ligne, le guichet unique des commerçants, pour simplifier et centraliser toutes les informations et démarches administratives à destination des commerces.
Concernant les travaux, on ne va pas se mentir, c’est rarement le moment le plus agréable, mais ils permettront d’avoir, demain, deux nouvelles lignes de tramway qui franchiront la Loire, c’est absolument indispensable. Durant cette période, une commission permet d’indemniser les commerçants et une offre découverte d’un mois de transports en commun gratuits est proposée aux personnes qui souhaitent changer leur mode de transport si elles sont impactées par la circulation.
Audrey Poinçon : Je travaille dans la restauration, donc le soir, et cela favorise malheureusement les risques. Est-ce que quelque chose est prévu pour les employés comme les clients ?
J. R. : Notre objectif est de renforcer notre action aux côtés de l’Etat, notamment dans le centre-ville, en lien avec les commerçants afin qu’ils nous signalent à quelle heure le soir sortent leurs collaborateurs ou leur clientèle, de façon à cibler la meilleure réponse à apporter. Soit par exemple d’élargir les horaires des transports en commun, ou proposer un poste de médiation sur l’espace public pour rassurer et sécuriser. On regarde toutes les options de manière très pragmatique pour trouver la meilleure avec les représentants des commerçants.
Chantal Le Breton : Je suis maman d’un adolescent de 17 ans et j’interdis à mon fils d’aller en centre-ville par crainte des agressions la nuit. Comment faire pour que nos jeunes puissent se promener sans risque dans les rues de Nantes ?
J. R. : Merci d’abord pour cette question évidemment importante. Je partage le fait que c’est un sujet prioritaire et une attente légitime de toutes les Nantaises et de tous les Nantais. Ce sujet, je l’ai pris totalement à bras-le-corps. On travaille en bonne intelligence avec les services de l’État et le procureur de la République, car nous avons aussi besoin de la justice. En permanence, la police municipale et la police nationale travaillent ensemble. Quand j’ai été élue maire, il n’y avait aucune caméra de vidéoprotection dans la ville. C’était un choix. Il y en a plus de 300 aujourd’hui. Nous sommes aussi en train de doubler les effectifs de la police municipale. On a mis en place une brigade de l’espace public, une brigade canine. Bref, on mobilise tous les moyens, vraiment tous les moyens qui sont à notre disposition pour travailler sur la totalité de la chaîne. L’éducation, la prévention, mais aussi quand c’est nécessaire, la sanction et la fermeté. Ces efforts sont payants comme le prouve la baisse des faits de délinquance.
Bricia Tavares : Sur l’Île de Nantes, j’ai vu la croissance d’un nouveau quartier ces cinq dernières années et j’avoue que j’ai été légèrement déçue. Quelle est le niveau d’ambition environnementale sur ce quartier ?
J. R. : Aujourd’hui, nous travaillons d’une part sur les bâtiments existants pour utiliser notamment les surfaces de toitures disponibles au service de la transition écologique, soit en modifiant leur couleur, en les végétalisant ou soit en y installant des panneaux photovoltaïques. On a réorienté certains projets comme le parking - rue Anatole-de-Monzie pour débitumer et planter des arbres. Dans le mandat, on avait dit qu’on débitumerait 7 hectares. On sera à 14 hectares. On avait dit qu’on planterait 25 000 arbres et arbustes. On sera à 50 000. Donc vraiment, on met les bouchées doubles sur ce sujet. Et dans la nouvelle étape de l’île de Nantes qui s’ouvre, on a vraiment mis cet enjeu au cœur du projet, notamment grâce à un nouveau grand parc métropolitain de 10 hectares, en face du futur parc de Pirmil-Les-Îles.
Patrice Prud’homme : J’ai dû mal à voir l’effort qui est fait sur la végétalisation, notamment sur la nouvelle place du Commerce ou dans les quartiers.
J. R. : Quand le projet de Feydeau-Commerce a été livré, beaucoup de Nantaises et de Nantais ont apprécié les aménagements et la nature en ville près des lignes de tramway. Mais spécifiquement sur la Place du Commerce, des habitants m’ont dit, ça nous interroge, voire on ne comprend pas pourquoi avoir fait ça. L’explication est technique : il y un parking souterrain à cet endroit et on ne peut donc pas planter d’arbres, ça ne s’improvise pas. Je pense néanmoins qu’un responsable politique moderne, un maire, doit reconnaître que ça n’a pas été totalement réussi. C’est mieux d’assumer. Donc j’ai demandé aux équipes de retravailler pour ajouter des arbres aux alentours. Par ailleurs, nous sommes la seule ville de France à consacrer autant de moyens à la nature dans les quartiers populaires. Sur un budget de 17 millions de la direction Nature et Jardins, 9 millions sont investis dans les quartiers populaires. Sur Bellevue, on avait la place des Lauriers, ce que les habitants du quartier appelaient la dalle, que du béton. C’est en train d’être transformé en square. Aux Dervallières, on est en train de désimperméabiliser là aussi la place des Dervallières. Au Breil, on a livré un nouvel espace qui nous avait été demandé y compris par les assistantes maternelles du quartier.
Alidou Alira et François Gallien : Nous sommes dans un contexte de réduction budgétaire, comment la municipalité compte-t-elle accompagner et structures culturelles et comment sont attribuées les subventions aux associations ?
J. R. : Nantes est, et va rester, une grande ville de culture. Ça fait partie de son identité, ça fait partie des moments d’émotions partagées, que ce soit à la Folle journée ou Hip Opsession. Que ce soit au Musée d’Arts avec l’exposition Hypersensible qu’on a eue il y a plusieurs mois maintenant, qui a battu les records de fréquentation, où on trouvait à la fois des familles, qui franchissaient pour la première fois la porte d’un musée, mais aussi des spécialistes de cette esthétique. Donc, à Nantes, clairement, la culture n’est pas et ne sera pas une variable d’ajustement. Ça veut dire que le budget de la culture est maintenu. Il faut savoir que les attributions d’aides, de subventions aux associations font l’objet d’un processus démocratique qui débute par la sollicitation des élus qui pilotent chacun leur politique publique, en matière de culture, d’éducation ou encore de solidarité, puis il y une instruction par les services techniques et enfin un vote en conseil municipal. Dans ce mandat, on a aussi mis en œuvre avec mon équipe la gratuité des bibliothèques. Depuis qu’on l’a fait, on a une augmentation de la fréquentation de plus de 57 %. Pour moi, c’est une fierté.
Qui sont les Nantaises et les Nantais qui ont réalisé cette interview ?
Paul Guo - Commerçant, Nantes Est
Chantal Le Breton - Responsable de gestion en cabinet comptable, Nantes Erdre
Audrey Poinçon - Directrice d’exploitation en restauration, Centre-ville
Bricia Tavarès - Architecte, Île-de-Nantes
Patrice Prud'homme - Retraité, Dervallières-Zola
Alidou Alira - Animateur périscolaire, Malakoff - Saint-Donatien
François Gallien - Retraité, Beaulieu
Les 7 habitantes et habitants qui ont rencontré la maire Johanna Rolland ont été sélectionnés par l’institut de sondage indépendant TMO. Celui-ci a constitué un groupe représentatif de la diversité de la population nantaise.