
Le bégaiement mais aussi le bredouillement autrement appelés troubles de la fluence ou de la communication sont des handicaps qui touchent environ 1 % de la population. Des handicaps souvent invisibles comme l’explique Stéphanie Le Saout, orthophoniste et déléguée départementale 44 de l’association « Parole Bégaiement » : « on peut évoquer la théorie de l’iceberg pour décrire le bégaiement : il y a la partie visible avec les manifestations perceptibles comme les mots et les phrases qui ont du mal à sortir, la tension que cela peut générer sur les mains, le visage, mais il y aussi une partie invisible très importante à travers la honte, la frustration, la colère ou l’anxiété que le bégaiement produit. »
« Parole Bégaiement » est une association nationale aux missions diverses et variées, allant de l’organisation de colloques de recherche à celles de journées et soirées d’information sur ce sujet trop peu visible. En plus de ces activités, l’association s’oriente également vers la sensibilisation et la prévention auprès du grand-public ou dans les établissements scolaires pour faire face à une des conséquences engendrée par le bégaiement : les discriminations.
« La société porte une vision validiste où les personnes valides sont la norme » explique Benjamin Loustaunau, membre de l’association « Éloquence de la différence » et ancien finaliste du concours. « Ces discriminations sont des portes ouvertes au harcèlement à l’école, mais elles interviennent aussi dans le domaine de l’emploi puisque nous nous exposons aux discriminations à l’embauche, par peur, méconnaissance ou incompréhension ». Pour chaque personne qui bégaie il y a des manières particulières de le vivre et des conséquences propres comme l’explique Géraud Nichet, salarié de Parole et Bégaiement « les personnes qui bégaient peuvent même s’auto-censurer, en s’empêchant de faire des métiers particuliers, en s’empêchant de parler, de communiquer ».
Un concours d'éloquence pour s'affirmer
Pour contrer l’isolement et la dépréciation qui peuvent être des corollaires du bégaiement, l’enjeu qui se pose dès lors est de mieux connaître et mieux accepter son bégaiement. Le concours « l’éloquence du bégaiement » est né de ce double objectif d’à la fois travailler à accepter son handicap et s’accepter soi, mais aussi de médiatiser et vulgariser le bégaiement auprès du grand public.
Le concours, né à Paris en 2019 s’est depuis exporté dans plusieurs grandes villes françaises. Les participants retenus participent à un programme de 30h de formation réparties sur 5 semaines. « Au programme : masterclass avec des formateurs pros et bénévoles, un travail sur la voix et la mise en voix, la gestuelle, mais aussi sur l’écriture pour répondre aux contraintes du concours, à savoir un sujet libre et un sujet imposé » décrit Géraud Nichet, lui aussi ancien finaliste de l’évènement. « Pendant ces sessions de formations, le bégaiement n’est pas le sujet principal et l’objectif n’est pas principalement thérapeutique » poursuit Stéphanie Le Saout « c’est davantage un travail sur le dépassement de soi et sur l’acceptation ». Le programme permet aussi de faire se rencontrer les gens entre eux, d’appréhender les troubles du rythme de la parole par l’altérité.
D’autant que le concours d’éloquence ne se tient pas n’importe où. En 2023 (mais aussi pour la prochaine édition en 2025), il s'est déroulé dans le prestigieux Théâtre Graslin à Nantes, où plus de 650 personnes ont pu assister à l’évènement. « Le lieu est un symbole » assure Benjamin Loustaunau, « un symbole du mythe de la parole parfaite qu’il convient de désacraliser ». Un lieu symbole, un programme enrichissant pour l’ensemble des participants et participantes, et un réel travail qui porte ses fruit, puisque comme le conclut Géraud Nichet « la parole se libère, il ne faut pas garder les mots pour soi. Le bégaiement n’empêche pas l’éloquence ».
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